
Comment avez-vous débuté dans l’arbitrage ?
J’ai fait mes débuts à l’âge de 16 ans. A l’époque, j’étais jeune éducateur auprès de joueurs débutants donc régulièrement il fallait prendre le sifflet. Un dirigeant m’a alors dit que ça avait l’air de me plaire… c’était vrai donc j’ai essayé en m’inscrivant à une formation. C’est sans aucun doute la plus belle décision sportive que j’ai prise de ma vie !
Une décision qui vous a mené loin…
J’ai commencé comme tout arbitre au niveau district et j’ai gravi les échelons qui m’ont mené jusqu’en Ligue 1 en août 2008. Mon premier match a été Caen – Valenciennes. Puis il y a eu les débuts internationaux en mars 2010 une rencontre Italie – Hongrie, la Champion’s League en 2015, le championnat d’Europe en France en 2016, la première coupe du Monde en 2018 en Russie et celle que nous venons de vivre fin 2022 au Qatar…
Quelles qualités faut-il pour devenir arbitre ?
Il faut aimer le foot. Pour moi ça a toujours été une vraie passion. Ajoutez à cela que j’aime prendre des décisions et les affirmer. C’est une forme de courage sachant qu’on peut forcément déplaire voire même ne pas avoir raison… mais l’arbitre est là pour faire avancer les choses, en étant le plus juste possible. Et sans lui, pas de compétition !
La pression aujourd’hui doit être énorme ?
Les enjeux sont en effet très importants : médiatiques, économiques et bien entendu sportifs. Mais l’envie et le goût de la décision restent les mêmes, qu’on soit en district ou en coupe du Monde. Au final, arbitrer permet aux autres donc aux joueurs de pouvoir évoluer dans de bonnes conditions.
Quel est votre avis sur l’assistance vidéo (VAR) qui ne fait pas l’unanimité ?
La VAR a été une réforme très positive car elle a permis de réduire de 75% les erreurs humaines donc de ramener de l’équité et de la justice sportive dans les matchs. Certes, on peut regretter un peu de perte de temps pour les vérifications mais là aussi il faut relativiser : ces contrôles vidéo ne sont que la quatrième cause de temps perdu après les célébrations, les changements et les blessures.
Comme dans toute activité, il y a le monde amateur et le monde professionnel et forcément, une telle technologie n’est pas possible à tous les niveaux. Il faut le comprendre et l’accepter.
Enfin, derrière les écrans, il y a des hommes et des femmes qui interprètent des images. Nul n’est infaillible mais force est de constater que le nombre d’erreurs est de plus en plus réduit. Le zéro erreur n’existera jamais, ni pour les arbitres ni pour les joueurs sur le terrain.
Pourtant vous affirmez qu’arbitre est la place la plus excitante c’est sur le terrain ?
Bien sûr l’activité d’arbitre est difficile car nous évoluons dans un environnement où l’on ne nous pardonne rien. Notre société a malheureusement perdu le sens de la modération d’où les difficultés que nous pouvons rencontrer, les réactions extrêmes et les comportements inappropriés. Nous aurions bien besoin d’un retour du sens de la pondération qui permette dialogue, échange et compréhension mutuelle.
Quel bilan tirez-vous de votre coupe du monde ?
Avec mon équipe d’arbitres assistants et vidéo, nous avons officié lors de deux matchs de poule et pour le 1/8ème de finale entre le Brésil et la Corée du Sud. J’estime que nous avons rempli notre contrat et que nous pouvons être fiers de notre parcours. C’était encore une fois une belle aventure. Notre équipe nationale a brillé : Bravo à eux !
Quels sont vos prochains objectifs ?
J’en ai encore plein la tête mais vous me permettrez de les garder pour mon équipe et moi…
D’ici là vous reprenez votre bâton de pèlerin…
Je me rends dans les clubs en tant que conseiller technique en arbitrage au sein de la Ligue de Football de Bourgogne Franche-Comté. Les gamins ont une réelle envie d’essayer de prendre le sifflet. Ils accrochent bien lors de ces moments de découverte et c’est encourageant même si ensuite ils restent des hésitations quand il s’agit de franchir le pas. C’est tout le défi que nous devons relever au niveau de la fédération, des ligues, des districts pour emporter la décision de ces jeunes afin qu’ils deviennent arbitres et s’épanouissent dans cette belle mission.