La tension chez les agriculteurs du massif jurassien n’a jamais été aussi forte alors que le Super Comice de Pontarlier ce samedi 22 octobre célèbre la filière sept ans après le dernier rendez-vous.
Une première louve abattue le 20 septembre
Après un été parsemé d’attaques de loup poussant le préfet du Doubs Jean-François Colombet à se rendre à Mouthe (16 septembre) pour rassurer la filière, une première louve a été abattue le 20 septembre aux Longevilles-Mont d’Or. Là où une parcelle avait été prédatée deux jours plus tôt, tuant une génisse et en blessant trois autres. Trois semaines de calme ont suivi, laissant penser que le plus dur était passé alors que l’hiver approche et que les bêtes rentreront bientôt à l’étable.
Le 3 octobre, Jean-François Colombet s’est à nouveau rendu dans le Haut-Doubs du côté de Labergement-Sainte-Marie aux côtés du préfet référent du plan loup, Jean-Paul Celet. Une première visite pour matérialiser les annonces faites à Mouthe et réfléchir à la manière de faire cohabiter le loup et l’élevage dans une zone transfrontalière. Une réunion interdite à la presse.
Une réunion le 3 octobre pour réfléchir à l’échelle du Massif
Services de l‘État, établissements publics, collectivités territoriales, sénateurs et députés, représentants de l’agriculture, associations environnementales, représentants des chasseurs, Serge Castel préfet du jura Cornelis Neet, directeur général de l’environnement du Canton de Vaud en Suisse, tous étaient présents pour une étude à l’échelle du Massif.
« Deux meutes sont actuellement établies sur des endroits précis, pas la troisième. Les spécificités de l’élevage de nos zones AOP pénalisent parfois les agriculteurs pour se protéger du loup. Il y a un vrai esprit de concorde entre tous les acteurs. Personne ne veut la fin du loup sur le massif, personne ne veut « faire un carton » et tout le monde veut préserver l’élevage. », analysait le préfet du Doubs.
Un manque cruel de connaissance sur le comportement des meutes
Derrière cette réunion une réalité ressort : les informations sur le comportement des meutes manquent cruellement. Jean-Paul Celet l’admet « […] les spécificités du territoire ne nous permettent pas d’utiliser les moyens traditionnels que nous connaissons, par exemple, dans les Alpes ». D’où l’urgence de coordonner les informations entre France et Suisse. Les analyses génétiques de la louve abattue le 20 septembre ont trainé : « les marqueurs entre nos deux pays sont différents. », poursuit Jean-François Colombet. L’autopsie a démontré que la louve n’était pas pleine mais des attaches placentaires ont prouvé qu’elle avait déjà eu 4 louveteaux. Récemment ? Seraient-ils seuls dans la nature ou aux côtés d’une meute ? Aucune certitude.
Nouvelle attaque dès le lendemain
Si cette réunion n’a pas réglé le problème, depuis le 21 septembre, aucune autre attaque n’avait été recensée. Telle une provocation supplémentaire à l’administration secouée par ce dossier, le loup a à nouveau sévi le lendemain, en Suisse. Une génisse a été tuée à quelques kilomètres de la frontière sur la commune du Chenit près de Chaux-Neuve, là où Jean-François Colombet s’était rendu le 16 septembre pour présenter un plan d’actions de l’État…
La commune française a aussi été touchée dans la même semaine. Le week-end du 8 et 9 octobre, trois établissements à la Chapelle d’Huin, Rochejean et donc Chaux-Neuve ont subi des attaques. L’OFB a confirmé qu’il s’agissait du loup alors qu’à Rochejean, l’alpage des Granges Raguin a dû euthanasier sa génisse.
Une liste qui ne s’arrête pas
Alors que des expérimentations de l’ARB sur la façon de protéger les troupeaux sur le massif du Jura sont en cours, comme l’avait annoncé Jean-François Colombet le 3 octobre, la liste des attaques ne cesse de s’allonger, toujours du même côté. Cette fois c’est la Chapelle-des-Bois qui a à nouveau perdue deux génisses. Sur cette commune de moins de 300 habitants, quatre Gaec ont été attaqués. Le manque d’informations génétiques se fait encore plus ressentir. Toujours est-il que trois loups ont été observés lors de cette dernière attaque du 10 octobre, autant qu’au 21 septembre avant d’abattre la louve. Le nombre de prédateurs de la meute du Risoux semble avoir été sous-estimé.
« Aujourd’hui chaque agriculteur du Haut-Doubs ne dort plus et se demande quand viendra son tour », expliquait le président de la FDSEA du Doubs Florent Dornier, au début du mois. La Fédération Naitonale Ovine (FNO) a rencontré Jean-Paul Celet le 13 octobre. Au cours de cette réunion, le préfet a annoncé que les prédations de loups avaient augmenté de 20% en 2022 dans l’Hexagone.
Un enjeu national donc pour lequel le ministre de l’Agriculture a dû répondre localement lors du Super Comice ce samedi 22 octobre (A lire la semaine prochaine dans nos colonnes).
M.S