Mamadou Sallio Diallo ne dort plus. Il pleure parfois aussi, en repensant à tous ce qu’il pourrait perdre dans moins de quinze jours. Mercredi 1er juin, le jeune guinéen a reçu un courrier de la préfecture, lui indiquant de quitter le territoire avant la fin du mois, sous peine d’expulsion. La raison ? Un acte de naissance falsifié selon la Préfecture.
Une arrivée en 2019
Pourtant Mamadou a entrepris toutes les démarches administratives nécessaires et possibles depuis son arrivée en France en 2019. Passé par l’Espagne avant de rejoindre Besançon à l’aide d’un ami, il est ensuite pris en charge par l’Aide sociale de l’enfance (ASE). Il n’a alors que 15 ans, ne parle pas français et démarre une seconde vie, à partir de rien. « Je suis arrivé le 14 février 2019 à Besançon et dès avril, j’ai commencé mes premiers stages au restaurant. Je faisais une semaine d’apprentissage et deux semaines de cours pour apprendre le français et découvrir la vie ici. Au mois de septembre j’ai commencé un CAP cuisinier au CFA Hilaire de Chardonnet tout en restant à l’Antr’Act. », confie-t-il. En 2021, le guinéen décroche un CDI dans le restaurant qui l’a formé.
L’intégration n’est pas sans difficultés. « Nous avions déjà travaillé avec l’ASE et nous avions besoin de monde. Mamad’ était volontaire et déterminé à apprendre tout ce qu’il fallait dès le début. Il faut se rendre compte des progrès et efforts qu’il a fait pour s’intégrer. Il a passé des heures à observer, à apprendre le nom des légumes en français, à cuisiner correctement. Durant les premiers confinements je n’étais quasiment qu’avec lui en cuisine pour préparer les commandes à emporter. On a noué des liens forts mais surtout, il a toujours voulu s’investir à fond. Aujourd’hui c’est très rare de trouver des gens comme lui et voilà que la Préfecture veut détruire tous ses efforts. C’est scandaleux. », explique Romuald Garozzo, co-gérant de l’Antr’Act aux côtés de Romain Donier.
Un acte de naissance validé par l’ambassade de Guinée
Concernant l’acte de naissance de Mamadou Sallio Diallo, l’intéressé et ses patrons sont formels : l’ambassade de Guinée a validé le document, conforme aux règles. « La Préfecture et les différentes administrations ont mon dossier depuis trois ans et ils décident de ça uniquement maintenant… Je suis choqué à l’idée de devoir partir, je n’ai aucun avenir ailleurs, j’ai commencé à faire ma vie ici… ».
Les patrons de l’Antr’act ont immédiatement entrepris des démarches. Les élus locaux ont été alertés, une pétition circule et compte actuellement plus de 2000 signatures. Un avocat spécialiste des droits des migrants a été contacté, comme l’association « Patrons Solidaires », initié par Stéphane Ravacley, dont le premier combat ressemble en tout point à celui de Romuald Garozzo et Romain Donier. « Nous l’avons contacté, nous sommes censés le rencontrer dans la semaine. Nous voudrions un laps de temps supplémentaire pour trouver une solution à ce scandale. On veut sauver Mamadou, c’est tout. »