Les skieurs et vacanciers étaient pour le moins surpris ce lundi 20 février, lorsque cortège ministériel s’est arrêté en plein milieu des pistes. Au centre de l’attention, Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires. Une visite surprise également pour toutes les personnalités publiques du territoire. Prévenues moins d’une semaine avant le rendez-vous, toutes ou presque ont bousculé leur agenda pour s’afficher aux côtés du membre du gouvernement. Un plus que d’autres : Philippe Alpy (voir édito).
Derrière la vitrine médiatique, le sujet de fond reste le même : depuis 1970, en moyenne trois stations de skis françaises ferment définitivement leurs pistes chaque année. Une donnée qui s’est accentuée au rythme du réchauffement climatique. À Métabief, ce rythme justement a triplé depuis les années 2000.
2015 : début du changement
« L’investissement était estimé à l’époque à 15 millions d’euros alors que nous avions déjà 14 millions de dettes pour un chiffre d’affaire annuel d’environ 4M d’€. »
Après les canons à neige en 2013 (Ndlr : près de 6 millions d’€) pourtant, on imagine d’abord des grands travaux pour la station. En 2015, l’hypothèse de deux nouveaux télésièges reliant Piquemiette et SuperLongevilles au sommet du Mont d’Or, à l’image du télésiège du Morond, est d’ailleurs toujours évoquée. Des infrastructures neuves, plus longues, plus rapides, pour remplacer la multitude de remontées mécaniques vétustes et énergivores. « On a fait une introspection au sein des services. L’investissement était estimé à l’époque à 15 millions d’euros alors que nous avions déjà 14 millions de dettes pour un chiffre d’affaire annuel d’environ 4M d’€. », souligne Olivier Érard, directeur de la station.
Le projet fond comme neige au soleil. Face aux prévisions climatiques et la remise en question du ski alpin dès 2030, le Département – qui finance quasiment en intégralité la station de Métabief via le Syndicat Mixte du Mont d’Or – revoit sa copie. « Nous n’avions pas 20 ans de garanties de neige. Les prévisions météorologiques montrent l’inverse, il fallait déjà penser à l’après », se souvient Philippe Alpy, vice-président au Département et président du syndicat du Mont d’Or.
Une dépendance touristique encore énorme
Olivier Érard a présenté en 15 minutes le site
au Ministre de la transition écologique.Avec des chiffres conséquents : Métabief génère 50% des retombées économiques touristiques sur le Haut-Doubs et 90% de ce chiffre repose sur le ski alpin.
Pour le remplacer, c’est donc tout un modèle
à repenser.
60 centimètres de neige cumulée cette saison contre 2m50 en moyenne
Ce lundi 20 février, l’élu s’est même appuyé sur les chiffres pour conforter ce choix. « Cette année c’est à peine 60 centimètres de neige cumulée qui est tombée, l’an dernier 1,39 mètre, pour une moyenne habituelle de 2,50 mètres. Les périodes de froid qui permettent de faire la neige de culture (Ndlr : l’utilisation des canons à neige) se comptent aussi. La saison passée nous en avons eu deux tout comme cette année pour l’instant. Sans cette neige de culture, nous n’aurions pas ouvert à Noël, ni pour ces vacances. »
Alors la station a décidé de conserver et restaurer les équipements déjà en place. Une « maintenance de haute qualité » jusqu’au « couperet », dixit Olivier Érard. Traduction : les plus anciens télésièges s’arrêteront avec la neige.
Parallèlement, les différentes institutions publiques – Département en tête – ont attribué 7,4M d’€ pour la période 2021-2027 pour le maintien du ski alpin, l’entretien des équipements et la rénovation du télésiège « Troupézy ».
Élargir la marque au-delà de la station
Seul, le site ne Métabief ne comblera pas le manque à gagner, lié à la baisse puis la fin du ski alpin. Les acteurs locaux veulent rayonner au-delà. « Nous avons des règles environnementales, agricoles et forestières à respecter. Il faut faire émerger d’autres activités sur l’ensemble du territoire du Haut-Doubs. Changer de regard et de périmètre. », poursuit Olivier Érard. Mettre l’accent sur le VTT, le trail et les randonnées, les exemples phares du « quatre saisons ».
Paradoxalement, le symbole actuel de cette mutation est toujours sur Métabief avec la luge des Cimes. Installée au pied des pistes depuis l’été 2022, l’activité fonctionne dix mois par an et sa construction a nécessité un investissement de 4,25M d’€ (Ndlr : avec une participation du Département, de la Région et de l’État). Une somme inclue dans les 12,6M€ engagés entre 2022 et 2025 pour la transformation du site de ski alpin en « station de montagne ». « Il y a une part de pragmatisme dans ce projet. Nous ne sommes pas fermés aux nouvelles opportunités. », confie Olivier Érard.
Ce lundi 20 février, Christophe Béchu est arrivé sous un temps printanier et une neige 100% artificielle ou presque. Depuis la terrasse, le ministre a pu observer un paysage du Haut-Doubs noyé de verdure en plein hiver. À quelques mètres pourtant, les meilleurs espoirs du slalom français s’entraînent. Métabief accueille la 4e étape du Ladies & Gentlemen Tour, un tournoi parrainé par la Fédération française de ski qui se déroule dans 5 stations différentes. Le site du Haut-Doubs apparaît aux côtés de Courchevel, Avoriaz ou encore Pyrénées 2000. « Ce qui se passe à Métabief, c’est ce qu’il va falloir faire ailleurs en France. », analysait presque logiquement le Ministre tout en annonçant un nouveau plan d’adaptation au changement climatique, présenté dans les prochains mois. « Cette station servira d’exemple pour notre réflexion. »
M.S