Grand Besançon Métropole. Voté de justesse, le Versement mobilité déchire le conseil communautaire

Le point n° 57 du conseil communautaire de GBM du 26 juin 2025, devait décider de l’augmentation de 1,8 à 2% du Versement mobilité, contribution payée par les entreprises de plus de 11 salariés sur l’agglomération, pour compenser la gratuité partielle des transports en commun votée en avril dernier. Les opposants ont tout tenté pour changer le vote d’une majorité d’élus, en vain.

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Réseau Transports en communs Ginko de Besançon
Le réseau de transports en commun Ginko est l'un des moins chers de France ©Keolis Besançon Mobilités

C’est une mesure qui est loin d’avoir fait l’unanimité au sein du conseil communautaire. Après 1h30 d’échanges, la décision d’augmenter de 1,8 à 2% le taux de Versement mobilité (voir encadré) sur le territoire de Grand Besançon, a été votée par 4 voix d’écart (54 voix pour et 50 voix contre).


Un choix politique de la majorité qui, avec ces nouvelles recettes, finance notamment la gratuité partielle du réseau Ginko, votée en avril et en vigueur le 1er juillet. Désormais, la gratuité sur tout le réseau de l’agglomération est accordée aux usagers de moins de 15 ans. Pour les 15-25 ans, c’est un tarif unique jeunes & étudiants à 16,80€ par mois ou 180 € par an. L’ensemble des bénéficiaires du RSA disposent d’un Pass mensuel à 2€. Enfin, les transports sont gratuits pour tout le monde le samedi.

Cette gratuité partielle engendre un coût supplémentaire évalué à 3 millions d’euros. Sa compensation par la hausse du Versement mobilité rapporterait 4,5 millions. Une taxe payée par les entreprises du territoire ne passe pas auprès de bon nombre d’élus à GBM.

« Une faute de gestion », pour Gabriel Baulieu, 1er vice-président de GBM

Assis à côté de la présidente Anne Vignot, son 1er vice-président et maire de Serre-les-Sapins Gabriel Baulieu, ne mâche pas ses mots. « On donne un vrai coup de canif à tout le travail que nous menons depuis des années en matière d’attractivité et d’équipements du territoire, en particulier dans les transports […] C’est une faute de gestion. En votant cela, on se prive à chaque mandat de l’équivalent d’une voie en site propre comme celle entre Temis et Viotte ».

Gabriel Baulieu, 1er vice-président en charge des finances n’a pas mâché ses mots face à Anne Vignot, Présidente de GBM. ©YQ

À son tour Benoît Vuillemin, maire de Saône et vice-président de GBM en charge du Tourisme s’est élevé contre cette décision. Pour l’élu, avec ce choix, la majorité en place utilise une règlementation dédiée aux villes touristiques pour « combler le trou lié à la gratuité partielle. Je ne retrouve pas de mesure touristique là-dedans ». Jusqu’ici, la Ville de Besançon profitait du statut de ville touristique pour mettre en place un Versement mobilité à hauteur d’1,8% de la masse salariale des entreprises de plus de 11 salariés, concernées par cette taxe (voir encadré). En augmentant ce versement à son seuil maximal (2%), « on travestit la réglementation, j’appelle à ce que l’on vote contre », poursuit Benoît Vuillemin.

Un débat et une aubaine pour Ludovic Fagaut, conseiller municipal d’opposition (Besançon Maintenant) et vice-président au Département. Fidèle à son style hyperbolique, l’élu parle « d’erreur monumentale », « la taxe de trop ». « Les masques tombent, vous allez impacter 900 entreprises du territoire qui financent déjà le budget mobilité de notre territoire à 66%. Ces mêmes entreprises qui financent déjà à hauteur de 50% les abonnements de leurs salariés. Le tissu économique mérite à mon avis qu’on le laisse un peu tranquille en ce moment », lance l’élu, évoquant en parallèle la hausse de 1,8% de la Contribution Foncière des Entreprises (CFE). S’adressant à Anne Vignot et sa majorité, Ludovic Fagaut conclut sa tribune d’une dernière attaque cinglante : « Vous êtes attachée à vos lubies électoralistes, mais vous allez encore une fois trop loin ».

Absence d’équité sur le territoire

Habituée à passer la parole à tout le monde avant de répondre, Anne Vignot ne laisse pas passer cette remarque. « On abîme la démocratie avec ce genre de phrases. Ce n’est pas une lubie d’Anne Vignot, il faut respecter les choix d’une assemblée ».

Pas de quoi calmer la colère des autres élus locaux, au contraire. Marcel Felt dénonce un vote à la manière de l’Assemblée nationale, « où l’on place des amendements tard le soir pour les faire passer alors qu’ils bouleverseront beaucoup de choses. Un vote comme celui-ci, il doit s’assumer, on ne le met pas à 23h ».  Catherine Barthelet, maire de Pelousey et vice-présidente en charge du projet de territoire pointe un problème d’équité pour les plus jeunes. « Tous les enfants de la ville, et tant mieux, pourront profiter des activités scolaires et extra-scolaires gratuitement. Pour les élèves et collégiens des communes aux alentours, ils continueront de payer plein tarif et ça, tout le monde s’en fiche ». Rares ont été les élus non-bisontins à prendre la parole pour soutenir ce vote.

Une taxe qui concerne « 7% des 14 000 entreprises de GBM »

Parmi les défenseurs, Christophe Lime vice-président communiste chargé de la Gestion de l’eau à GBM a d’abord rappelé « l’impact immédiat sur la fréquentation » du tarif étudiant au moment de son lancement. « Cette décision va concerner moins de 7% des 14 000 entreprises sur GBM », répond l’élu avant d’esquisser un exemple : « pour une entreprise de 400 salariés, c’est une hausse de 35 000 €. Si elle coule après ça, ce n’est pas cette augmentation qui la fait tomber, c’est autre chose ».

De son côté, Nicolas Bodin insiste sur l’importance de développer une offre de mobilités « sur les zones d’activités, là où se trouvent les principaux contributeurs qui doivent profiter de cet avantage ». L’ancien chef de file socialiste à la mairie de Besançon et vice-président de GBM en charge de l’Économie a surtout orienté le débat sur la fiscalité des entreprises en France « l’une des plus hautes d’Europe ». « L’impôt a totalement été dévoyé par rapport à son origine, malgré cela je vais voter la hausse du versement mobilités ». Comme l’élu socialiste, 51,9% des élus ont voté pour cette hausse du Versement mobilité. En période de canicule, les élus écologistes et leurs soutiens sont passés tout près d’une douche froide.

Le Versement mobilité, c’est quoi et comment est-il calculé ?
Le versement mobilité (anciennement appelé « versement transport ») est une participation des entreprises du secteur public comme privé d’au moins 11 salariés au financement des transports en commun. Ce versement s’applique dans les zones où il est institué par une autorité organisatrice de la mobilité (AOM), en l’espèce le réseau Ginko à Besançon. Elle est recouvrée chaque mois par l’Urssaf, qui la reverse à l’AOM. Les employeurs privés et publics employant 11 salariés et plus sont soumis à ce versement. Seules les fondations et associations reconnues d’utilité publique dont l’activité a un caractère social en sont exonérées.
Certains salariés ne sont pas pris en compte dans l’effectif pour le calcul du versement mobilités. C’est le cas des conducteurs routiers longue distance, absents de leur entreprise toute la semaine, des salariés en CDD remplaçant une personne absente, des apprentis et des bénéficiaires de contrats d’accompagnement dans l’emploi. Depuis le 1er janvier 2020, le franchissement du seuil de 11 salariés est pris en compte lorsque ce seuil est atteint ou dépassé pendant 5 années consécutives.
Ainsi, si l’effectif moyen annuel pendant ces 5 années, descend en dessous de 11 salariés, l’employeur n’est plus soumis au versement mobilité. Dans la période, si l’effectif refranchit le seuil de 11 salariés, l’employeur bénéficie alors à nouveau de la neutralisation pendant 5 ans.

La rédaction