Si les élus de l’actuelle municipalité se sont écharpés sur ce rapport d’observations lors du dernier conseil municipal jeudi 7 novembre, notamment à propos de potentielles économies réalisables, aucun n’a fait mention du cas spécifique d’un agent ayant pourtant eu des « conséquences financières importantes pour la commune de Besançon », comme l’explique la Chambre Régionale des Comptes (CRC), de Bourgogne Franche-Comté.
Celui de l’ancienne collaboratrice du cabinet de Jean-Louis Fousseret, maire de la ville jusqu’en 2020. Chargée des relations avec la presse, Alexandra Cordier a été licenciée pour la Ville de Besançon le 1er janvier 2020 « au motif que son projet personnel (candidate aux élections municipales en 2020) était incompatible avec ses fonctions de collaborateur de cabinet », note le rapport. Un licenciement trois mois avant les élections, comme le veut le règlement, qui a permis à l’agent de la ville de bénéficier d’une indemnité de licenciement de 6294,31€ et d’une indemnité compensatrice de congés payés de 8064,20€. « La chambre a vérifié la régularité des modalités de calcul de ces deux indemnités. Le coût chargé pour la ville de Besançon s’élève à 20 243,52 €. », précise le rapport, ajoutant que l’agent en question a ensuite sollicité une indemnisation pour perte d’emploi à laquelle la ville a fait droit dans un courrier du 24 janvier 2020. « Dans ce cadre, l’agent s’est vu allouer 730 allocations journalières d’aide au retour à l’emploi (ARE), à compter du 24 février 2020. […] Il a perçu l’entièreté des droits ouverts pour un montant global à la charge de la Ville de Besançon de 73 893,30 €. »
La collectivité a choisi le licenciement
Or dans ce cas précis, la Chambre Régionale des Comptes assure qu’Alexandra Cordier « aurait dû démissionner de ses fonctions pour être éligible ». Aucune indemnité n’aurait été alors possible, ni aucun droit pour la perception des allocations pour perte d’emploi. Avec une conclusion explicite pour la CRC : « plutôt qu’une démission de l’intéressée, le choix de la collectivité a donc été de la licencier à moins de trois mois du terme de son contrat. […] La Chambre constate que l’incompatibilité entre la position du salarié municipal de l’agent et sa candidature n’était pas le fait de la commune qui n’avait donc pas à gérer les conséquences, notamment financières, de cette situation particulière. Le choix de la procédure de licenciement a permis à l’agent de bénéficier d’avantages dont il n’aurait pu se prévaloir en cas de démission. »
« L’agent ne voulait pas démissionner »
Dans un courrier adressé le 27 août 2024 au Président de la Chambre Régionale des Comptes, l’ancien édile de Besançon aujourd’hui maire honoraire fait part de son incompréhension quant à ce dossier. Jean-Louis Fousseret l’assure : « les décisions prises concernant l’agent ne l’ont été que pour protéger la Ville de Besançon. » Pour l’ancien élu « l’ensemble des règles de droit applicables aux collaborateurs ont été strictement respectées par la Collectivité dans la gestion de cette situation », précisant toutefois dans l’annexe de son courrier, qu’Alexandra Cordier ne voulait pas démissionner. « Le licenciement était donc le seul moyen d’avoir la certitude que les liens entre la Ville et l’intéressée soient rompus de façon définitive », au 1er janvier.
Jean-Louis Fousseret le répète, c’est bien la collectivité qui est à l’initiative de ce départ, pour se prémunir contre les conséquences du choix de son agent. « Il ne me paraît pas juste de présenter ce choix comme ayant occasionné un coût pour la Commune en comparant le coût du licenciement avec celui d’une démission volontaire. » Pour justifier les sommes déboursées par la collectivité dans ce dossier, l’ancien élu parle de « conséquences financières anticipées » dont les montants sont ceux qu’aurait dû toucher Alexandra Cordier si elle était allée jusqu’au bout de son contrat prenant fin le 3 juillet 2020. Toutefois, si la collaboratrice avait choisi d’aller au bout de sa mission au cabinet du maire, elle n’aurait jamais pu se présenter aux élections municipales.
Alexandra Cordier assure qu’elle voulait démissionner
De son côté Alexandra Cordier assure avoir voulu démissionner dans un premier temps, « ce que la collectivité a refusé. Je n’ai jamais demandé à être licenciée. La collectivité avait le choix entre la démission ou le licenciement, elle a fait son choix. Le plus important était de clarifier pour éviter toute confusion possible et que je sorte de la mairie pour faire campagne. La commission nationale des comptes de campagne a validé mes comptes. Rien n’a été soulevé, de ma sortie de la mairie jusqu’aux comptes de ma campagne, tout a été fait en bonne et due forme. Concernant les ARE, pour ceux que ça choque, la Ville est son propre assureur. Elle doit payer les ARE de tous ses anciens employés. »
Lorsqu’on évoque le courrier de Jean-Louis Fousseret adressé à la Chambre Régionale des Comptes, assurant l’inverse, Alexandra Cordier maintient : « Je m’en tiens à ce que j’ai dit et la manière dont j’ai vécu les choses. J’ai voulu démissionner, la collectivité a refusé et on m’a licenciée pour clarifier la situation. Tout cela a été validé. […] Laver le linge sale comme ça, ça ne me plaît pas du tout. La ville de Besançon a choisi le motif de mon licenciement et l’a imposé. »
Pour rappel au lancement de sa campagne en décembre 2019, deux semaines avant son licenciement officiel, Alexandra Cordier avait présenté son équipe avec Jean-Louis Fousseret en dernière position de colistier. Avec 4,57% des suffrages au premier tour, la candidate avait ensuite soutenu Ludovic Fagaut pour le second tour, remporté de peu par la liste d’Anne Vignot.
Martin Saussard