Besançon tient une place particulière dans le cœur et l’esprit d’Antoine Tracqui. C’est ici, au CHRU Jean Minjoz, que le médecin a terminé sa carrière il y a quelques mois. « Officiellement depuis le 1er octobre », rappelle l’intéressé. « Je suis retraité de mes fonctions hospitalo-universitaires mais je continue à faire des autopsies, en cas de besoin ». Son arrivée dans la capitale comtoise 8 ans plus tôt coïncide également avec son premier scénario de bande dessinée, retranscrit dans Oracle, Le Clairvoyant (Éditions Soleil, 2016, 15,95€). L’histoire fantastique « à la sauce mythologie grecque » où les pérégrinations d’Homère retracent les combats entre des hommes et des dieux, demi-dieux, nymphes… « Avec le temps, je trouve que c’est le moins abouti. Mais il a plutôt bien été accueilli par la critique ! », concède Antoine Tracqui, qui aura tout de même passé six mois à scénariser ses 52 premières planches, en parallèle d’une trilogie de romans policiers, façon thriller (Point Zéro, 2013 – Mausolée, 2015 – Lune de Glace, 2020, Éditions Critic). « Ces deux formats n’ont rien à voir. Sur la BD, le passage entre une page paire et impaire impose un rythme d’écriture pour tenir en haleine le lecteur. En revanche, l’avantage, c’est la voix-off que l’on matérialise par une case supplémentaire dans une vignette ».
« J’ai trouvé la reconnaissance que je n’avais pas »
Six années passent entre cette première tentative et sa seconde bande dessinée sans rapport ou presque (Androïdes, Éditions Soleil 2021). « En 2015, j’ai commencé à écrire mon roman Lune de Glace. À l’intérieur, j’évoque un terrible attentat terroriste au moment où, je suis l’un des médecins légistes missionnés sur tous les attentats à Paris. J’ai participé aux autopsies des victimes de Charlie Hebdo puis en novembre, celles du Bataclan. Ça reste la semaine la plus difficile de ma carrière. Une fois rentré, j’étais incapable de continuer à écrire. À cela s’est ajoutée mon arrivée sur Besançon et mon travail intense sur de grosses affaires ».
Jonathann Daval, Narumi Kurosaki, les différents cas de la clinique Saint-Vincent (que le médecin refuse de nommer « Affaire Péchier », ndlr). Toutes ces affaires sont passées par l’expertise d’Antoine Tracqui. « Avec les romans et les BD, j’ai trouvé la reconnaissance que je n’avais pas au travers des milliers de rapports écrits dans le cadre de mon métier. Je voulais avoir un retour, faire plaisir aux gens et la volonté d’avoir aussi un exutoire. Je me suis juré à l’époque de ne jamais écrire sur la médecine légale ».
Autopsie : le dernier tome présenté le 25 juin 2025
Le scénariste accepte finalement la consigne de son nouvel éditeur Oxymore, avec qui il présente en octobre 2024, Le Sacrificateur, premier tome de sa trilogie Autopsie. Le médecin légiste n’a pas lésiné sur les détails. Le scénario et les images « ne sont pas pour tout le monde », prévient l’auteur en souriant. « Il fallait que ça tape pour le premier opus ! J’ai quasiment terminé ma carrière médico-légale, c’était le bon moment de parler de ça ». Les ventes et les retours ont été plus que satisfaisants pour Antoine Tracqui, qui dévoilera dans quelques jours son second volet d’Autopsie : Bloodie Sunday. Quelques mois pour défendre sa nouvelle œuvre, parcourir différents festivals et rendez-vous littéraires avant de conclure sa trilogie avec Autopsie : Retour à Innawanga, dévoilé le 25 juin 2025. Et si, avec lui, la BD se faisait une place à Livres Dans La Boucle ? Sa formule marche, l’écrivain fourmille d’idées et l’assure : après plus de 30 années de médecine légale, cette seconde vie d’auteur ne fait que commencer.
M.S