Auto-attribution de primes, dépenses personnelles avec le compte de l’ADAT, factures suspectes, les enquêteurs cherchent à comprendre comment l’ex-directeur de l’ADAT, une agence chapeautée par le Département, a pu librement utiliser cet argent public sans éveiller les soupçons. Dès l’annonce de cette affaire en décembre 2021, la présidente du Département Christine Bouquin, très proche du mis en examen, a signalé les faits au procureur de la République.
Une plainte pour abus de confiance
L’affaire éclate en décembre 2021. Après avoir suspendu Daniel Benazeraf de ses fonctions à titre conservatoire jusqu’au 31 mars 2022, l’audit financier commandé à un cabinet indépendant fait apparaître plusieurs faits qui conduisent Christine Bouquin à déposer plainte pour « abus de confiance et détournement d’argent public ».Premier constat : les salariés de l’Adat adhèrent à une amicale pour laquelle il faut cotiser. Cette amicale perçoit aussi une subvention de 15 000 €… versée par le conseil départemental. Des revenus que Daniel Benazeraf après plusieurs manœuvres bancaires, aurait déposé sur son compte personnel.
Une carte de paiement de l’agence pour ses frais personnels
A cela s’ajoute la gestion des véhicules de l’ADAT. Une succession de transactions concernant six véhicules ont mis la puce à l’oreille du cabinet d’audit. « Les véhicules ont été achetés par l’Adat et financés par les fonds du Département. À ses proches, le directeur a revendu les voitures à des coûts inférieurs à leur valeur réelle », explique le procureur qui précise que l’enquête a duré 10 mois.
Depuis 2019, l’ex-directeur utilisait une carte de paiement de l’agence qui a enregistré 285 opérations pour un montant total de 46 000€, dont 85% sans aucun justificatif. (Plusieurs milliers d’euros dépensés sur le site Amazon par exemple). Le 4 janvier 2022, la présidente avait adressé un courrier recommandé à Daniel Benazeraf, l’enjoignant de produire sans délai preuves de dépenses.
En février lors d’une séance extraordinaire pour cette affaire, la présidente avait confirmé que le directeur de l’ADAT avait déjà remboursé l’intégralité des primes indument perçues (Ndlr : 27 134€ entre janvier 2019 et novembre 2021), reconnaissant de fait sa culpabilité dans ce volet de l’affaire.
Le procureur pointe du doigt la « légèreté » du contrôle du Département
Daniel Benazeraf a reconnu tous les faits, évoquant la « facilité ». S’il est ressorti libre, il encourt jusqu’à sept ans de prison. Interrogée par les enquêteurs, l’ex-épouse du directeur a été rapidement mise hors de cause. Pour la secrétaire comptable, ayant en particulier établi les bulletins de salaire incluant une prime indue, le Parquet et les enquêteurs poursuivent leurs investigations. Elle pourrait être poursuivie pour complicité. Elle a en effet bénéficié de l’achat d’un véhicule à un prix « particulièrement attractif ».
Une affaire où l’accusé semble avoir profité de sa proximité avec la Présidente du Département pour abuser de sa confiance. Les preuves de la culpabilité de Daniel Benazeraf sont accablantes. D’ors et déjà, des saisies conservatoires ont été faites sur le patrimoine de l’ancien directeur. Il appartient maintenant au Conseil départemental de se porter ou non partie civile pour récupérer tout ou partie des autres sommes détournées.
La prochaine réunion du Conseil Départemental se déroule ce lundi 24 octobre et risque d’être très mouvementée.
Y.Q et M.S