Emmanuelle Hardy, référente harcèlement de l’Académie de Besançon

Alors que l'actualité ne cesse de relater des faits graves de harcèlement ayant même conduit à des suicides, elle accepte de faire un point sur les outils en place pour lutter contre ce fléau dont le gouvernement a fait une priorité.

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Pouvez-vous tout d’abord définir le harcèlement scolaire ?

C’est un phénomène qui malheureusement existe en milieu scolaire comme il peut aussi exister dans le monde du travail pour les adultes. En ce qui concerne les enfants, on parle de moqueries répétées, d’intimidations, de mises à l’écart avec pour la victime un mal-être ressenti au quotidien et une impossibilité pour elle de se soustraire à la situation. C’est évidemment puni par la loi, dans les écoles comme ça l’est pour toutes les formes de harcèlement.

A-t-il les mêmes caractéristiques suivant l’âge des élèves ?

Chez les plus petits, il peut s’agir d’interdire un lieu à un autre enfant ou de l’écarter systématiquement des jeux donc de l’isoler alors que chez les plus grands, au collège et au lycée, le harcèlement se déplace sur les réseaux sociaux qui vont alors décupler les effets. On parle plus alors d’une atteinte à la réputation ou de nuisances à la dignité. Dans tous les cas, on ne peut pas accepter qu’un enfant ou un adolescent ne veuille plus aller à l’école pu pire qu’il en vienne à se suicider. L’école doit au contraire être pour lui l’endroit le plus sécure qui soit.

Étonnamment, le harcèlement est plus présent dans les petites classes ?

En effet, d’après les enquêtes nationales et les données dont nous disposons, on retrouverait en moyenne 10% des enfants scolarisés seraient victimes de ce type d’agissement au cours de leur scolarité mais ils seraient 15% au niveau élémentaire. Ce qui montre d’ailleurs qu’il est important d’intensifier l’apprentissage de l’acceptation des différences et de la nécessité de bien vivre avec les autres, donc de sensibiliser très tôt les enfants à la notion de tolérance.

Que propose l’Education Nationale face au harcèlement ?

Depuis deux ans, un plan global de prévention et de traitement des situations de harcèlement existe, c’est le dispositif Phare. Ecoles, collèges, lycées, aujourd’hui 100 % des écoles et établissements mettent en œuvre ce programme. Dans chacun d’eux, il existe une équipe ressource qui est chargée de mettre en œuvre le protocole de prise en charge des situations de harcèlement. Les équipes ressources sont formées sur le plan académique t bénéficient de conseils de la part des référents académiques ou départementaux. D’autre part, dans chaque école, collège ou lycée, 10 heures d’apprentissage annuelles sont dispensées à tous les élèves du CP à la terminale, sur ce sujet et enfin il existe des élèves ambassadeurs vers qui se tourner.

Justement, concrètement, que doit faire un enfant en cas de harcèlement scolaire ?

Il existe au niveau national une ligne téléphonique d’écoute et de signalement, le 3018. L’essentiel est de toute façon de libérer la parole en parlant aux parents, au chef d’établissement, à un professeur ou à un camarade. Il ne faut surtout pas se taire et attendre mais au contraire dénoncer très tôt de tels comportements pour que la communauté éducative puisse intervenir ?

Quelles suites sont possibles après un signalement ?

Le dispositif Phare prévoit que les parents de l’élève victime soient rapidement informés de même que ceux du présumé auteur de harcèlement, dont l’enfant sera convoqué avec eux. Après une analyse de la situation entre la direction et l’équipe ressource, la première réponse à apporter est de venir en aide à la victime pour que cesse la situation dénoncée. Dès lors qu’un enfant parle, il doit en effet être écouté et il ne faut pas minimiser son ressenti. Sachant que lors des divers entretiens avec les différentes parties, nous essayons de faire émerger les meilleures solutions. Le renvoi temporaire ou l’exclusion définitive en font bien sûr partie mais ce ne sont pas les uniques réponses.

Quels signes doivent alerter les parents d’un enfant victime ?

Un élève qui a systématiquement mal au ventre au moment de partir le matin, qui a des angoisses répétées, qui pleure sans raison apparente et qui montre des réticences à aller à l’école, voilà des signes précoces qui doivent alerter. Tout n’est pas forcément du au harcèlement bien sûr mais il ne faut pas négliger ces symptômes. Si des parents font ce constat, ils doivent immédiatement mettre l’établissement au courant afin que le problème soit traité en commun.

Quelles nouveautés suite aux annonces ministérielles ?

La prévention du harcèlement et la prise en charge des situations sont partagées par différents ministères pour que le phénomène soit appréhendé dans sa globalité. Cela montre la priorité absolue donnée à la lutte contre ce fléau. Nos élèves, nos enfants doivent pouvoir apprendre sereinement, un bon climat scolaire est garant d’un contexte favorable à tous les apprentissages.