Besançon. Procès Péchier : L’anesthésiste admet un quatrième empoisonnement sur un patient, dont il n’est pas responsable

Depuis l’ouverture du procès le 8 septembre, les cas de neuf patients ont été étudiés (au 13 octobre ndlr). Frédéric Péchier, accusé de 30 empoisonnements dont 12 mortels, admet désormais l'existence de quatre empoisonnements, alors qu’il avait rejeté de telles hypothèses tout au long de l’enquête judiciaire. Il assure ne pas être le responsable.

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Photo : Cassandra Tempesta

La sixième semaine d’audience touche à sa fin. Depuis le 8 septembre, l’anesthésiste Frédéric Péchier comparaît devant la Cour d’Assises du Doubs, accusé d’avoir empoisonné 30 patients à la clinique Saint-Vincent et à la Polyclinique de Franche-Comté entre 2008 et 2017, dont 12 mortels. Le 13 octobre se tenait le cinquième interrogatoire de l’accusé, reprenant les cas d’Éric Gendronneau et Sylvie Gaillard, tous les deux ayant échappé à la mort en 2009, à 17 jours d’intervalle

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Si pendant les huit années d’enquête judiciaire Frédéric Péchier rejetait l’hypothèse d’empoisonnements pour l’ensemble des cas versés au dossier, hormis celui de son patient Jean-Claude Gandon, la défense semble désormais changer de stratégie. L’anesthésiste a reconnu qu’Éric Gendronneau a bien été empoisonné, mais pas par lui, portant à quatre le nombre de crimes admis par la défense, après Jean-Claude Gandon, Sandra Simard et Damien Iehlen. « J’ai entendu les explications des experts », explique l’accusé à la barre. 

« Je ne suis pas transparent »

Tout le monde s’accorde donc sur l’origine malveillante de l’arrêt cardiaque d’Éric Gendronneau, mais des questions sur le mode opératoire restent en suspens. Quand ? Comment ? Il existe une poche polluée à la lidocaïne mais elle n’aurait a priori pas été utilisée. Deuxième option, une injection intraveineuse en cours d’opération. Une alternative retenue par l’accusé qui dédouane son collègue, le Dr Jeangirard, anesthésiste en charge du patient, « je vois mal un anesthésiste injecter sur son propre patient un produit délétère ». Alors qui ? « Sur les quatre empoisonnements, s’agit-il du même empoisonneur ? », demande Christine de Curraize, avocate générale. « Je ne sais pas, mais ce n’est pas moi », affirme l’accusé. S’il travaillait dans le bloc voisin, Frédéric Péchier rappelle qu’aucun personnel de bloc ne l’a vu entrer avant 11h50, heure à laquelle il a été appelé. « Qui que ce soit qui ait empoisonné monsieur Gendronneau, on ne peut pas faire autrement que de le voir. Je ne suis pas transparent »

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Pour ce qui est de Sylvie Gaillard, l’accusé maintient sa position, il ne s’agit pas d’un empoisonnement mais « d’un trouble du rythme sur hypokaliémie ». Cette fois, aucune trace d’anesthésiques locaux n’a été retrouvée dans les séquestres.

« Ça suffit Monsieur Péchier ! »

C’est un nouvel interrogatoire qu’à dû affronter Frédéric Péchier, avec quelques tensions palpables, notamment lors des questions du ministère public. « Tenez-vous correctement et adoptez un autre ton ! », l’a recadré la présidente Delphine Thibierge au bout de quelques minutes d’échanges avec Thérèse Brunisso, avocate générale. Cette dernière est restée ferme dans ses questions et ses accusations. « Depuis 2017 et le début de ce procès, tout est à charge que ce soit par vous ou par la présidente », finit par lâcher Frédéric Péchier. « Ça suffit Monsieur Péchier ! Il arrive un moment où il faut savoir se taire. Vous n’êtes pas en conférence de presse, on mesure ses propos devant une Cour d’Assises. On ne dit pas d’une présidente qu’elle est à charge ou partiale », tonne Thérèse Brunisso. 

Depuis le début du procès, Frédéric Péchier regrette qu’on ait donné « qu’un nom. C’est un empilement. C’est une construction intellectuelle, comme disait mon avocat ». Il reste présumé innocent. Les jurés ont jusqu’au 19 décembre, jour où le verdict est attendu, pour se faire une intime conviction.