Dominique Maire, président des Restos du Cœur du Doubs

La nouvelle campagne s’ouvre sur fond d’inquiétude alors que jamais le nombre de bénéficiaires n’a été aussi élevé. Malheureusement, les moyens manquent et des personnes devront être refusées. Une situation frustrante pour les bénévoles mais indispensable à la survie des Restos.

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Quel est le bilan de la dernière campagne des Restos ?

Au niveau national, sur l’exercice 2022-2023, les Restos du Cœur ont accueilli 1,3 million de personnes et distribué gratuitement 171 millions de repas. C’est-à-dire une augmentation importante de 200 000 personnes supplémentaires qui ont eu besoin des Restos et 30 millions de repas de plus par rapport à l’année précédente. Dans le département du Doubs, la tendance est malheureusement la même : 10 578 personnes soit 2 364 de plus que l’année précédente et 1 676 550 repas distribués soit 359 787 de plus. Une hausse qui se poursuit année après année.

 

Une augmentation impressionnante en effet…comment faites-vous face ?

Cela représente une hausse de 27%. Il s’agit de la progression la plus massive et la plus brutale de l’histoire de l’association. La pauvreté et la précarité progressent plus que jamais. Notre mission est donc de plus en plus difficile à mener à bien pour venir en aide comme nous l’avons toujours fait jusqu’à présent à toutes les personnes en difficulté.

Le président des Restos l’a annoncé au niveau national et je relaie cet appel au niveau local : nous avons besoin de plus de dons, financiers ou en nature de la part des particuliers qui le peuvent mais aussi des entreprises. Nous avons également besoin de bénévoles supplémentaires dans quasiment tous nos centres d’accueil et dans notre entrepôt de Miserey Salines.

 

Les Restos du Cœur sont-ils en péril ?

Notre 39ème campagne qui vient de s’ouvrir est pleine d’incertitudes. Nous achetons un tiers des denrées que nous distribuons. Or, avec l’inflation que nous subissons donc aussi en tant qu’acheteur, la situation est difficile. Il est impossible de continuer dans de telles conditions comme par le passé. D’où les mesures annoncées par notre président national. D’abord, nous ne mettons pas en place le barème hiver, plus accessible que celui d’été, qui ferait encore augmenter le nombre de bénéficiaires, un afflux que nous ne pourrions pas absorber. Et bien malgré nous, nous ne distribuerons plus que quatre repas par personne par semaine au lieu de six…

 

Où sont situés les Restos dans le Doubs ?

Nous avons deux centres d’accueil à Besançon, à Planoise et Chalezeule, d’autres à Audincourt et à Montbéliard, Baume-les-Dames, L’Isle-sur-le-Doubs, Maîche, Morteau, Ornans, Valdahon et Pontarlier. S’y ajoute notre centre itinérant par camion qui se déplace dans la campagne du Doubs depuis quatre ans, à la rencontre des bénéficiaires dans les secteurs d’Arc-et-Senans, Saône, Bouclans, Devecey, Sancey, Saint-Hippolyte, Colombier-Fontaine et Rougemont… Cette itinérance nécessite un gros travail de préparation mais s’avère indispensable pour aller à la rencontre de bénéficiaires qui sinon, ne feraient pas le déplacement dans les autres centres.

 

La typologie de bénéficiaires évolue-t-elle ?

L’augmentation en volume concerne toutes les catégories de publics que nous accueillions déjà, qu’il s’agisse des retraités, des familles monoparentales, des étudiants, des personnes sans emploi et des travailleurs à temps partiel par exemple qui ne peuvent pas eux non plus boucler leurs fins de mois. On constate que près de la moitié des personnes accueillies a moins de 25 ans ce qui est un autre paramètre inquiétant pour l’avenir. Tout comme le fait que 60 % des personnes accueillies vivent avec moins de la moitié du seuil de pauvreté soit 551 euros par mois. Autre élément aggravant à souligner, pour un tiers d’entre elles, elles n’ont plus un seul euro une fois le loyer et les charges payés…

Quelles autres aides peuvent apporter les Restos ?

Depuis de nombreuses années nos actions vont bien au-delà de la seule aide alimentaire puisque nous proposons l’intervention de coiffeurs, les Restos bébés, l’accompagnement pour l’accès au droit et à la justice, le conseil budgétaire, le micro-crédit, des sorties culture et loisirs ou un coup de pouce pour l’accès à internet afin de lutter contre l’exclusion numérique.  En complément nous avons développé le soutien à la recherche d’emploi ou l’insertion professionnelle, une action qui porte ses fruits puisque plus de la moitié des personnes qui sortent de nos chantiers d’insertion accèdent à un emploi ou à une formation. Toutes ces actions sont accessibles à tous celles et ceux qui frappent à notre porte même si elles n’ont pas accès à l’aide alimentaire