Doubs. Une COP Régionale encore floue

Le ministre de la transition écologique Christophe Béchu a annoncé le lancement de la COP régionale pour répondre à la planification écologique, au niveau local. Derrière ce nouveau projet technocratique, un calendrier très resserré pour un résultat encore très flou.

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Le ministre de la Transition écologique s'était rendu à Métabief en février 2023 pour constater le changement de cap mené par la station pour faire face au changement climatique. Photo MS

 Les caméras du monde entier se sont braquées sur Dubaï du 30 novembre au 13 décembre 2023, date de la dernière COP 28. Ce rendez-vous des Nations Unies où les dirigeants du monde entier définissent les actions à mener pour préserver la planète du changement climatique a surtout remis les accords de Paris sur le devant de la scène. « Nous devons nous atteler à la mise en œuvre de l’Accord de ParisAu début 2025, les pays doivent fournir de nouvelles contributions déterminées au niveau national. Chaque engagement, qu’il s’agisse de financement, d’adaptation ou d’atténuation, doit nous permettre de nous rapprocher d’un monde à 1,5 degré. », a déclaré Simon Steill, secrétaire exécutif de la branche Climat de l’ONU, sept ans après la signature de la COP21.

Une mise en place qui agace

Au même moment en France, le ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires Christophe Béchu terminait son Tour de France de la planification écologique. Avec un mot d’ordre : territorialiser cette COP au niveau régional. En Bourgogne Franche-Comté, la première étape a débuté le 12 décembre, avec une rencontre aux côtés de Marie-Guite Dufay, présidente de la Région. Derrière l’ambitieuse présentation du gouvernement, la mise en place agace.

Chaque préfet a reçu l’ordre de présenter et faire suivre le plan national aux collectivités avec une temporalité jugée « intenable ». Les communes et EPCI (intercommunalités) disposent de deux mois pour répondre à un formulaire de 150 questions, réparties en 30 leviers d’action. Par exemple, l’agglomération utilise-t-elle des bus électriques ? A-t-elle déjà engagée des travaux de rénovation des écoles ou des projets d’EnR, si oui lesquels ? À chacune de ces questions, les élus doivent répondre en « cochant des cases ». « On a ensuite une feuille Excell qui sort avec un nombre d’étoiles pour connaître notre situation par rapport aux enjeux. », explique Geoffrey Darmencier, directeur du département Transition Écologique à la Ville de Besançon et à Grand Besançon Métropole. « On est dans un système de poupée russes, tous ces questionnaires vont être synthétisés au niveau départemental puis régional avec une vision macro pour savoir si nous répondons aux objectifs fixés par l’État. C’est très technocratique… », concède l’intéressé.

Le maire et président du Grand Pontarlier Patrick Genre, est beaucoup plus dubitatif. « On y va à marche forcée et in-fine, à quoi ça va servir ? On nous a tellement présenté de plans et schémas, celui semble être le plus concret même si ça donne encore l’impression qu’on ne fait jamais rien, alors que les élus locaux n’attendent pas les directives de Paris pour se bouger. Laissons la chance à cette territorialisation, même s’il y a encore beaucoup de questions. »

Plan Climat, Sraddet, label de l’Ademe… pour quelle issue ?

Avec une feuille de route départementale à dresser en six mois, difficile d’établir un vrai diagnostic local. « Les objectifs annoncés au niveau national sont extrêmement louables et ambitieux mais la méthode d’application paraît lourde. On sort d’un épisode sur les Zones d’accélération d’Énergies renouvelables (ZAER) et on nous demande de replonger pour définir, concerter, valider… Ça vient en plus de ce que l’on fait déjà. », poursuit Geoffrey Darmencier. Avec cette COP régionale néanmoins, les enjeux climatiques ne sont plus seulement liés à la décarbonation et la feuille de route va servir de juge de paix entre les différentes collectivités. « On a toujours l’impression d’être bon ou au contraire mauvais. Avec ce recensement on saura mieux où l’on doit aller, il décloisonne la question écologique ».

Graphique issue du dossier de presse de la COP Régionale.

5% de l’effort national en BFC

L’État fixe à 5% la part de la Bourgogne Franche-Comté dans l’effort national pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Un niveau plus faible que ces voisines. Fin janvier, les différents diagnostics seront remontés à la Préfecture. Débutera alors une période de négociations qui inquiètent les élus. À priori, les actions actuelles ou prévues ne permettent pas d’atteindre les objectifs nationaux fixés. « Je crains les injonctions qui peuvent en découler. Il y aura inévitablement une levée de boucliers. Peut-être que dans six mois au contraire, nous serons très satisfaits. Pour l’instant nous sommes pressés de répondre et patienter ensuite. C’est difficile d’imaginer l’avenir dans 20 ans en trois semaines. »

La feuille de route de cette COP Régionale sera dévoilée à l’été 2024 avec à l’intérieur, des financements débloqués en fonction des projets annoncés. Anne Vignot, maire de Besançon, s’était déjà inquiétée auprès du Ministre du manque de moyens alloués. La réindustrialisation française aurait aussi son rôle à jouer d’après le gouvernement : entre 1995 et 2019, les émissions de gaz à effet de serre produits en France ont chuté de 25% quand celles liées à l’importation ont explosé (+72%). Réindustrialiser le territoire, produire sur notre sol tout en respectant les objectifs écologiques et environnementaux fixés.

M.S