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Aurélien Bouveret affiche plutôt fièrement son mini-guide 2023. Une soixantaine de pages uniquement dédiées aux différents festivals du département, en Franche-Comté et même sur les territoires voisins. Une sorte de répertoire pour sortir tous les week-ends ou presque et ce, tout au long de l’été. « J’ai même refusé du monde… Chaque festival participe financièrement à la création et on l’imprime en 30 000 exemplaires distribués gratuitement. Je n’en ai déjà plus ! », s’étonne le créateur du label indépendant Odeva. Un signe rassurant pour lui comme d’autres professionnels du secteur et il en faut. La dernière décennie presque miracle pour les festivals a quasiment été effacée par trois années de crises sanitaires. « C’est simple, en 2019 je crois, tous les festivals que je connaissais dans le Doubs étaient complets. À la Paille (Ndlr : Aurélien Bouveret est également programmateur pour ce festival) entre 2016 et 2019, ce sont nos meilleures années. Et il y a eu ce que l’on connaît… », analyse l’intéressé.

Des années dorées, stoppées par la crise

Derrière l’énorme succès des Eurockéennes, nommé meilleur festival du monde aux Arthur Awards de Londres en 2019, les rendez-vous déjà en place se réinventent ou se développent tandis que de jeunes associations ambitieuses implantent « leur » festival. Fimu, Rencontres & Racines, Détonation, Festival de la Paille, Pop’Cornes Festival, Rolling Saône, No Logo… La Franche-Comté, terre de festivals, n’échappe pas à une crise sanitaire… foudroyante. « Heureusement que l’on avait une trésorerie et encore ! Sans ça on aurait surement dû dire stop une année ! »,avoue Sébastien Piganiol, président de la Paille.

En coulisse, le monde des festivals se connaît bien et les informations circulent très vite. « Il y a des événements qui repartent, je ne sais pas comment honnêtement. Attention, c’est une très bonne chose pour la culture et le public ! Financièrement en revanche, il faut rembourser des dettes parfois énormes et tu ne peux pas le faire en augmentant le prix des places car tu perds ton public. », confie Aurélien Bouveret.

Crédit : Jerome Saillard

Augmentation des coûts, ambitions retravaillées

 Conscients du business florissant des festivals, avec la volonté d’amortir une période sans concerts avec de faibles revenus, les mastodontes de la musique ont gonflé les prix des artistes, y compris des groupes qui montent. « C’est une réalité mais tout a augmenté ! Les sous-traitants liés à l’évènementiel, la restauration, le prix de l’énergie… »,poursuit Aurélien Bouveret. Là où les « gros » organisateurs ont une marge de manœuvre car ils font plusieurs événements à l’année, les « petits » doivent recalculer chaque partie de leur rendez-vous.

Le public a aussi revu sa manière de procéder et les dernières éditions des festivals ont accueilli des spectateurs jusqu’à la dernière minute. À Quingey au début du mois, l’Urban Road Festival a peut-être donné le ton. Avec une programmation majoritairement régionale (Lilian Renaud, Ecco, Pierre-Hugues José, etc.) le rendez-vous a attiré 1800 personnes sur deux jours pour sa première édition. Moins qu’espéré, même si son président a annoncé une seconde édition dans l’Est Républicain et espère obtenir plus de subventions.

Sur la commune de Montfaucon, le festival Ebulli’son a réussi à créer un engouement autour de son rendez-vous. Partenaires, bénévoles et public sont présents depuis le premier épisode, en 2018. « On a commencé peut-être modestement mais il fallait découvrir le monde des festivals et surtout savoir si le public répondrait présent ! », glisse Cyrpien Roze, président de l’association organisatrice. Cinq ans plus tard, Ebulli’son affiche toujours complet et s’est offert quelques bons coups, comme le duo Trinix, Pep’s ou Elmer Food Beat. « On veut vraiment que les locaux sentent que c’est « leur » festival. On est 180 bénévoles, c’est énorme ».

De son œil d’expert en la matière, Aurélien Bouveret ne tarit pas d’éloges sur ce rendez-vous. « Ebulli’son est un exemple de ce que va être le festival de demain. Le public ne veut plus simplement de la musique mais de l’animation, des bons plats locaux et une ambiance festive. Ça plaît aux jeunes tant mieux et la cible prioritaire reste les 30 – 50 ans qui viennent entre potes ou en famille pour se retrouver comme ils pourraient le faire dans un bar par exemple. La Paille a pris le virage depuis quelques années et la demande va dans ce sens. »

M.S