Édito. Au secours, le Comté les rend fous 

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Le Comté ne connait pas la crise !

Le Comté, notre fleuron régional, est au cœur de l’actualité. Pour de bonnes, enfin non, de mauvaises raisons. Depuis plusieurs années sa surproduction est pointée du doigt localement. La productivité toujours plus intensive sur des sols karstiques pour répondre à une demande toujours plus forte, participe à une dégradation exponentielle de l’environnement à laquelle s’ajoutent l’impact aggravant du réchauffement climatique et la pollution industrielle. Ce n’est plus un débat, mais un fait avéré contre lequel luttent aujourd’hui tous les acteurs agricoles et plus encore.

Car, in fine, c’est la filière elle-même qui court à sa perte. Inutile d’attendre le récit simpliste d’un écologue anti-chasse ou la grossière réponse orientée d’un journaliste passionné par les marins pour l’écrire. Il suffit de rester factuel. Tout est sous nos yeux : de 55 000 tonnes produites en 2005, le Comté est passé à 72 000 tonnes 20 ans plus tard.

Chez les agriculteurs, le dixième cahier des charges de la filière durcit les règles environnementales, notamment à propos de l’épandage du lisier, en s’appuyant sur une étude NutriKarst réalisée par le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM).
« Il faut faire encore plus », ce n’est pas moi qui le dis, c’est écrit sur le site internet de la filière.

En 2023, 14 fromageries (sur 95) sont mises en demeure dans le Doubs par la Préfecture pour non-conformité dans le traitement et le rejet d’eaux usées dans le milieu naturel. Un an plus tôt, les dirigeants de deux d’entre elles ont été condamnés en première instance pour avoir pollué les cours d’eau.

Plus récemment, le 25 février 2025, un Gaec producteur de lait en zone AOP Comté a été condamné à 40 000 € dont 30 000 € avec sursis pour avoir pollué la source noire alimentant Scey-Maisières en 2023. C’est long, c’est lent et même insuffisant pour certains, mais la prise de conscience est générale. C’est parce qu’elle l’est que cette surenchère médiatico-politique est d’autant plus scandaleuse. Qu’un écologue, militant de la cause animale, propose à tous de fausses-bonnes idées extrêmes ne devraient même pas faire réagir les connaisseurs. D’ailleurs personne n’a élevé la voix lorsque cette chronique est sortie, fin avril.

Toutefois, en relayant des mensonges au nom de la défense de notre terroir, propagés par des personnages qui n’ont que la haine des écologistes en tête, la Préfecture du Jura (oubliant son devoir de réserve), la ministre de l’Agriculture et autres députés incarnent une réelle faillite collective et un profond déni de la réalité. Sur les réseaux sociaux, le message « #TouchePasAuComté » est devenu viral.

Personne n’a jamais appelé à l’interdiction de notre fromage. En consommer rendrait-il fou ? C’est un amoureux du Comté d’été 24 mois qui vous pose la question. Loin des querelles politiques et débats de comptoir, nous parlons ici de l’avenir d’une économie, d’une agriculture, de nos rivières et de l’eau consommée. L’enjeu est trop grand pour agir ainsi.