Tout est parti d’une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux. Deux français à bord de leur véhicule sont contrôlés par la gendarmerie. Le conducteur tend un faux permis de conduire et une fausse pièce d’identité ou plutôt des papiers qui n’ont aucune valeur aux yeux de l’État. Ce couple refuse de consentir à notre société pour laquelle ils n’ont rien choisi. De ce fait, toutes les lois édictées sont illégales à leurs yeux, tout comme leur identité française. Le monde serait composé uniquement d’entreprises inscrites au registre du commerce américain (dont la France) depuis 1933, date à partir de laquelle – et ça c’est vrai – la base de notre système monétaire mondial passe de l’étalon-d’or au Bretton-Woods. Les citoyens et leur identité seraient une garantie pour les accords commerciaux. Changer d’identité permettrait de conserver une liberté mais surtout de s’émanciper des devoirs du citoyen français. Quelques techniques étayent cette croyance : écrire son nom en minuscule, dire « je ne contracte pas » pour éviter des contrôles, changer sa plaque d’immatriculation, etc.
La scène prêterait à sourire si elle ne masquait pas un dangereux développement lié à une misère sociale et économique grandissantes. C’est là le point de départ de toute dérive sectaire, celle-ci porte un nom : Citoyens Souverains, ou Sovereign Citizens. Née aux États-Unis son développement passe par des grands rassemblements mais aussi formations frauduleuses et coûteuses – des milliers d’euros pour ses adeptes – permettant notamment d’obtenir ces étranges documents d’identité nouvelle. Le FBI considère ce mouvement comme une menace nationale terroriste. Quant au couple sur la vidéo, le contrôle s’est terminé en garde à vue après une intervention musclée, pneus crevés et vitres brisées pour être emmenés de force. Cela n’a fait que renforcer leur conviction d’être victimes du système. Sur leurs réseaux sociaux et ceux de leurs cercles proches, les appels à la révolte se multiplient. Si en France, « ces refus de contracter » sont encore marginaux, aux États-Unis, les condamnations pour fraude sont régulières. Cette mouvance est même directement lié à un attentat (Oklahoma City en 1995) causant la mort de 168 citoyens américains. Et ce malgré leur seule règle sectaire : « ne pas voler, ni tuer ».