Réussite Emploi Franche-Comté au service de l’emploi dans les entreprises
L’association est implantée depuis 12 ans à Besançon. Cohésion sociale, insertion et accompagnement dans la formation des demandeurs d’emploi sont les principaux objectifs de Réussite Emploi Franche-Comté, présidée par Jean-Charles Thoulouze et dirigée par Fabienne Filippi. C’est donc en toute logique que l’association avait invité Philippe Pierre à interroger chefs d’entreprise et responsables des ressources humaines sur leurs méthodes de management et de recrutement.
Philippe Pierre un expert atypique dans le monde des ressources humaines
L’homme a pourtant un parcours universitaire classique (Sciences de gestion à la Sorbonne, Master RH à Sciences Po Paris puis un doctorat en sociologie). Il a surtout une grande expérience opérationnelle des Ressources Humaines, en particulier à la tête du service RH du Groupe L’Oréal.
Aujourd’hui consultant, il est aussi conférencier et formateur reconnu. Il enseigne à l’ESSEC, HEC Genève ou SciencesPo Paris où il peut faire le lien entre la pratique de terrain et les apports théoriques.
« Une entreprise apprenante protège les talents »
Il faut décloisonner, capitaliser les compétences et « assurer la montée en compétences dès le premier niveau d’encadrement ». Enseignant en écoles de commerce, Philippe PIERRE est confronté quotidiennement aux jeunes générations « petite poucette » (en référence au livre de Michel Serres) qui n’apprennent plus de la même façon. Le périmètre d’action de l’entreprise change en permanence au gré des modifications d’achat des clients. Et surtout, l’image de marque d’une entreprise est couplée à son image d’employeur et son attractivité pour les nouveaux collaborateurs. Les dirigeants, managers et salariés ont envie d’apprendre tout au long de leur parcours professionnel et ils doivent se renouveler.
« Recruter, c’est avoir affaire à une œuvre d’art »
Tout collaborateur dans une entreprise dispose de talents. Le recruteur doit aller chercher ces talents au-delà du CV qui n’est que l’explication du « savoir-faire technique ». Le « savoir-faire relationnel », le « savoir-faire faire » sont des atouts plus importants pour assurer la qualité de la présence et la capacité à se critiquer soi-même.
« Vers l’archipélisation des métiers »
Philippe Pierre parle de « l’entreprise archipel » pour évoquer l’évolution des mentalités et le renouveau des formes d’engagement au travail. « Le travail est-il au centre de nos vies ? » Beaucoup de salariés souhaitent transformer leur parcours professionnel trop rectiligne selon Philippe Pierre. « Ils veulent avoir plusieurs vies professionnelles en même temps » : poète, expert-comptable, aventurier et commercial la même semaine.
Les entreprises, quelle que soit leur taille, sont confrontées à la diversité : celle des origines, de l’âge voire même du genre. « Le nouveau management, tout en respectant les nouvelles exigences juridiques, doit encourager et récompenser l’innovation ».
« Comment être loyal sans être fidèle »
Selon l’expert en relations humaines, les organisations (entreprises, associations ou organisations publiques) doivent fidéliser leurs collaborateurs « en les préparant à partir ». Il s’agit bien là d’une évolution importante. Pour le salarié, comment être loyal et se former dans l’entreprise en ayant l’objectif d’en partir ? Pour l’employeur, comment s’assurer de la fidélité d’un collaborateur tout en lui offrant de nouvelles compétences qu’il mettra à profit ailleurs ? Comme en amour, peut-on aimer plusieurs fois en même temps ?
« L’égalitarisme désespère les méritants »
Philippe Pierre veut, comme Aristote, défendre l’équité en toutes circonstances. Mais l’égalitarisme est un poison. « Chaque talent percute les différences » poursuit-il. Et en matière de ressources humaines dans l’entreprise, on doit considérer a priori que « le talentueux est généreux par nature, qu’il a plus d’exigence, que l’on doit le protéger. Le recruteur est renvoyé à sa propre incompétence consciente ! »
Pendant plus d’une heure de causerie et d’échanges avec une salle comble à la Maison de l’Economie, les spectateurs ont remisé leurs certitudes : le sens de la pyramide hiérarchique « On est tous en dessous ou au-dessus de quelqu’un » et surtout la capacité à « l’étonnement volontaire ».
Dirigeants et salariés doivent apprendre « à changer en échangeant sans se perdre ».
L’entreprise doit devenir « désirable et fixer un cap, un cadre pour les jeunes qui sont notre avenir » a conclu Philippe Pierre.