« Nous vous suivrons à la culotte » : dans le Doubs les JA et la FDSEA convoquent les députés

Florent Dornier, président de la FDSEA 25, Mélanie Gruet, présidente des JA 25 et Émeline Balandret Secrétaire générale du syndicat agricole avaient exigé une rencontre le lundi 9 décembre avec les députés du Doubs.

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Le conseil d'administration de la FDSEA25 et des JA25 avaient convoqué les députés du Doubs le 9 décembre 2024 ©YQ
Les parlementaires n’ont pas l’habitude de recevoir des injonctions. Pourtant, Laurent Croizier, député de la 1ère circonscription, Matthieu Bloch, député de la 3ème circonscription, Géraldine Grangier, député de la 4ème circonscription et Éric Liégeon, député de la 5ème circonscription, tous avaient chamboulé leur emploi du temps pour répondre à la convocation des agriculteurs du Doubs. « Les excusés sont inexcusables » s’est irrité Florent Dornier, pointant du doigt Dominique Voynet, seule députée du département absente, représentée par un jeune attaché parlementaire.
« Nous sommes en colère »
Mélanie Gruet Présidente des JA25, Florent Dornier Président de la FDSEA25 et Émeline Balandret Secrétaire générale de la FDSEA ont listé les exigences du monde agricole aux députés présents le 9 décembre 2024 ©YQ

Le Président de la FDSEA25, principal syndicat du monde agricole le répète à l’envi : « nous sommes en colère et nous sommes fatigués. Entre un hémicycle qui ressemble depuis des mois à une cour de récréation et des actions raisonnables et raisonnées que nous menons depuis un an pour sauver nos filières et nos exploitations, nous avons le sentiment de ne pas être, ni écoutés, ni entendus ». Les agriculteurs ont dû faire face en 2024 à des récoltes catastrophiques, ont subi une crise sanitaire sans précédent et tout cela dans l’instabilité politique.

Une profession ouverte au dialogue

« Après les manifestations du début de l’année, nous avons fait des propositions, nous avons négocié pour obtenir des avancées en matière de fiscalité (sur le foncier non bâti ou un taux réduit pour le gasoil non routier). Rien ne s’est passé de juin à septembre et aujourd’hui tout tombe à l’eau ». Ces deux derniers mois, des solutions émergeaient avec le gouvernement Barnier, en particulier sur le régime de retraite des agriculteurs (prise en compte des 25 meilleures années), sur les allègements de charges et les aides à l’installation des jeunes agriculteurs. La censure du gouvernement a mis toutes ces mesures, et bien d’autres, sous le tapis. « Nous sommes pris pour des cons…on nous aime dans les discours et on nous poignarde dans le dos ». Les propos de Florent Dornier démontrent une profession « énervée mais pas résignée ».

« Qui produira l’alimentation demain ? »

Pour Mélanie Gruet, Présidente des Jeunes Agriculteurs (JA25), « nous avons besoin d’actions concrètes pour accompagner les jeunes à s’installer dans de bonnes conditions. Notre capacité à produire est intacte. Alors que nous avons besoin d’un France Service Agriculture, la commission européenne signe l’accord Mercosur ». Sur le traité Mercosur, les agriculteurs n’y sont pas opposés par principe. « Nous exigeons des clauses miroirs » (respect des mêmes règles sanitaires, administratives…que pour les pays européens NdlR)

Les députés corrigés comme des enfants
Les députés Laurent Croizier (1ère circonscription), Éric Liégeon (5ème circonscription), Matthieu Bloch (3ème circonscription) et Géraldine Grangier (4ème circonscription) avaient répondu présents à l’invitation de la FDSEA et des JA ©YQ

Ils ont écouté…tentant maladroitement, pour les uns de justifier le budget qui avait été présenté, pour les autres de justifier leur opposition et les raisons de la censure. Laurent Croizier (Modem) et Éric Liégeon (LR), soutiens du gouvernement Barnier, ont fustigé la censure : « vous avez raison d’être en colère » répond Éric Liégeon, lui aussi agriculteur à Courvières. « Les oppositions n’ont pas été responsables. Les problèmes sont toujours là. Je souhaite un accord rapide sur un gouvernement qui ne devra pas être censuré » complète Laurent Crozier.

Pour Matthieu Bloch (UDR, député de la 3e circonscription) : « j’ai envie de pleurer devant tant d’hypocrisie de ceux qui ont provoqué les conditions de la censure. Nous n’avons jamais été associés à l’élaboration du budget alors que nous représentons 11 millions d’électeurs. Nous ne pouvions pas tolérer un budget qui prévoyait 40 à 50 milliards d’impôts supplémentaires et la désindexation des pensions de retraites, mesures qui impactaient aussi les agriculteurs ».

Géraldine Grangier (RN) s’est dite touchée par la colère des agriculteurs :  » je vous assure que certaines mesures pourront être adoptées sans délai par voie d’amendements, en particulier s’agissant du calcul des retraites. J’y veillerai particulièrement. Il y a un large consensus sur la politique à appliquer pour sauver et développer notre agriculture…en votant cette motion de censure, nous avons envoyé un signal fort. Il est temps de remettre l’agriculture française au cœur des priorités de la Nation ».

« Des actions sans délai, maintenant ! »

Florent Dornier est revenu aux fondamentaux « Pouvez-vous vous engager à agir sans délai, à voter rapidement les mesures qui étaient dans le projet de loi de finances (PLF et PLFSS) ? » Laurent Croizier répond : « si un gouvernement devait être constitué dans les prochains jours, nous voterons une loi d’urgence (si nécessaire entre Noël et Nouvel An). J’imagine un budget 2025 voté en mars 2025 ». Pour Matthieu Bloch : « il existe une large majorité au Parlement pour voter les textes sur l’agriculture, textes qui vont dans le sens des demandes des agriculteurs ».

« La FNSEA est un fusible entre les agriculteurs et les pouvoirs publics. Et ce n’est pas seulement au moment des élections aux Chambres d’Agriculture. Quel que soit le gouvernement, nous vous suivrons à la culotte. Nous avons besoin d’actions concrètes sans délai…C’est maintenant » a conclu Florent Dornier.

Yves Quemeneur