« Marcher sur un sol blanc »
Le natif du Haut-Jura se souvient à la fois des paysages enneigés et de la rudesse des hivers. Fils d’un entrepreneur en plâtrerie, Il évoquait dans une rétrospective au Musée des Beaux-Arts de Besançon en 2001 « rêver de marcher sur un sol blanc ».
Benjamin Foudral, le conservateur du Pôle Courbet ne veut pas opposer Jean Ricardon et « l’outreblanc » à Pierre Soulages l’apôtre de « l’outrenoir ». « Ricardon a construit son œuvre en partant du figuratif contrairement à Soulages qui a très rapidement rompu avec la figuration ».
Le blanc-matériau essentiel
Dans les années 50 sa peinture est imprégnée par les écrits de Michel Seuphor (L’art abstrait). Il découvre les pionniers de l’art abstrait comme Kandinsky ou Mondrian. Il s’oriente vers une quête de la sobriété totale et un réexamen de la figuration. Malgré son attachement au sujet figuratif, ses réflexions picturales l’amènent vers la communauté de l’art abstrait très florissante dans les années 50.
L’amitié immortelle avec Michel Seuphor
Alors qu’il est professeur de peinture à l’école supérieure des Beaux-Arts de Besançon, le peintre comtois va rencontrer, à l’occasion d’une conférence, Michel Seuphor. L’historien d’art, poète et promoteur de l’art abstrait devient une personnalité centrale dans la carrière et la vie de Ricardon. Ils entretiendront une amitié de 30 ans faite de rencontres et de correspondances. Seuphor, très connu dans le monde de l’art, facilitera les expositions de Ricardon en France et en Europe. Grâce à Seuphor, Ricardon fut même exposé au Centre Pompidou en 1979.
L’hommage secret à Courbet
L’intérêt de Ricardon pour Courbet s’incarne à la fin de sa vie. Il réalise en 2010 un Portrait de Gustave Courbet, très figuratif, qui rompt avec le formalisme géométrique de son œuvre. Un second hommage au Maître d’Ornans intitulé Hommage à l’Enterrement à Ornans est réalisé par Ricardon. Il s’agit d’une longue frise laissée à l’état d’ébauche qui s’attarde sur ce qui constitue pour Ricardon (comme pour Courbet) l’essentiel : les visages. Cette œuvre de Ricardon était restée à sa mort dans son atelier. Elle est présentée pour la première fois au public.
Une perpétuelle quête spirituelle
Pour Ricardon, « le blanc est couleur de spiritualité et de pureté ». Sa quête spirituelle s’exprimera logiquement dans son travail à l’abbaye d’Acey. En 1991, il présentera la conception de 47 verrières monoblocs, répondant à l’austérité et la rigueur des règles cisterciennes. Les vitraux, conçus avec un maître-verrier et en collaboration avec la communauté monastique, s’inscrivent dans un renouveau du vitrail rendu possible par les commandes publiques. Pierre Soulages à l’abbaye de Conques et Jean Ricardon à celle d’Acey, ils proposent un langage renouvelé de l’art du vitrail.
Une exposition à ne pas manquer, des pas de géants entre Courbet et Ricardon.