Philippe Surot, directeur régional de la Prévention Routière

De nouvelles mesures sont entrées en vigueur en ce début d’année au grand désarroi de l’association pour la Prévention Routière qui y voit des signaux incohérents suite aux engagement politiques visant à diminuer le nombre de morts sur les routes.

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Comment évolue la sécurité routière dans notre pays ?

Nous avons assisté à une augmentation de la mortalité sur les routes en 2022 avec une situation disparate selon les départements. Les causes restent malheureusement toujours les mêmes à savoir l’alcool et la vitesse et toujours aussi les jeunes qui en proposition sont plus touchés que les autres.

Historiquement, les mesures prises par les autorités comme la ceinture de sécurité obligatoire, le permis à points et l’installation des radars automatiques ont eu des effets positifs. A chacune de ces étapes, le courbe de la mortalité a significativement baissé même si à chaque fois il y a des réticences dans la population car la voiture est considérée comme un vecteur de liberté et que, dès que les règles sont contraignantes, c’est forcément impopulaire. On note aussi depuis 5 à 10 ans une stagnation de la situation.

 

Les « petits » excès de vitesse ne feront plus perdre de points…votre avis ?

Il n’y a pas de petits excès de vitesse. Aucun n’est anodin. Un excès quel qu’il soit est un acte contraire à la loi et la prévention routière ne cautionne donc pas cette mesure. C’est un très mauvais signal envoyé aux conducteurs car je le rappelle, la vitesse est la première cause d’accidentologie et de mortalité.

Déjà le retour aux 90 km/h en redonnant la main aux départements sur la question avait été un très mauvais signal d’autant plus que sur les 80 km/h, le recul n’était pas encore suffisant pour bien en mesurer l’efficacité. Cela signifie aux yeux de tous que finalement, on tolère la vitesse…

 

On a pourtant l’impression que quelques km/h ce n’est pas si grave.

Je rappelle qu’accélérer et rouler à 85 au lieu de 80 ou 95 au lieu de 90 ne fait pas gagner de temps sur un trajet. C’est totalement insignifiant. Par contre, en augmentant la vitesse, on pollue plus, on consomme plus et on est plus dangereux pour soi et pour les autres . Nous aurions aimé aussi que les centres ville ne soient pas concernés, notamment pour le risque et la mise en danger des usagers plus fragiles (piétons/vélo/ trottinettes…)

 

Qu’en est-il des autres usagers de l’espace public ?

Le développement des mobilités douces ne fait qu’augmenter ces risques puisque piétons, cyclistes, trottinettes sont de plus en plus nombreux. Notre rôle est d’ailleurs aussi de les sensibiliser à leurs propres responsabilités et devoirs sur la route, sans pour autant être moralisateurs. Prenons l’exemple des utilisateurs de trottinettes : leur arrivée exponentielle dans l’espace public s’accompagne malheureusement pour beaucoup d’une méconnaissance de la législation. Il faut donc les informer, les éduquer sur les règles de base, autant du code de la route que de maniabilité.

 

Quel est votre point de vue sur le permis désormais possible dès l’âge de 17 ans ?

A priori, même si évidemment il faut attendre d’avoir du recul sur la mesure, cela ne va pas dans le sens de la sécurité routière puisque les jeunes sont déjà les plus touchés en la matière. Il  existe déjà la conduite accompagnée qui elle a fait ses preuves. Possible dès 15 ans avec l’opportunité d’avoir le permis dès l’âge de 17 ans révolus et donc de conduire mais pas seul avant d’avoir 18 ans. Cela permet d’acquérir une solide expérience en rencontrant de nombreux cas de figures sur la route, en étant confronté à beaucoup plus de situations différentes. Nos doutes concerne donc le devenir du dispositif conduite accompagnée. Si les jeunes démarre la conduite accompagne à 15 ans et passe le permis a 17 ans la mesure pourrait être très cohérente.

 

Pour les seniors, faut-il mettre en place des contrôles spécifiques ?

Les personnes âgées sont régulièrement stigmatisées et on entend dire ce qui est vrai que dans d’autres pays des contrôles médicaux ont lieu à un certain âge. Mais les pathologies ne sont pas forcément une question d’âge. Si nous le faisons, alors que ce soit pour l’ensemble de la population, à intervalles réguliers et que ce ne soit pas discriminatoire.

 

Comment pouvez-vous agir face à ces nombreuses problématiques ?

En menant des actions de sensibilisation pour l’ensemble de ces publics, jeunes ou moins jeunes. Il faut impérativement agir sur les comportements et imprégner des marqueurs forts dans les esprits pour faire comprendre que l’on peut préserver des vies en prenant les bonnes habitudes. Ce travail, nous l’effectuons grâce à un réseau de bénévoles motivés et formés. D’ailleurs, nous recrutons et sommes prêts à accueillir toutes les bonnes volontés prêtes à diffuser nos messages.