il n’y a pas de crise du volontariat en termes d’effectifs. Le problème se situe au niveau de la disponibilité de ces citoyens engagés.

Où en est le volontariat aujourd’hui dans le Doubs ?

Le Service Départemental d’Incendie et de Secours compte 3100 agents dont 110 personnels administratifs ou techniques et 410 sapeurs-pompiers professionnels. Tous les autres sont des sapeurs-pompiers volontaires, donc des personnes qui remplissent nos missions sur le temps libre, en dehors de leur activité professionnelle. Sur ces dix dernières années, on peut parler de stabilité numérique, que nous assurons notamment par des campagnes de recrutement locales ciblées. Donc il n’y a pas de crise du volontariat en termes d’effectifs. Le problème se situe au niveau de la disponibilité de ces citoyens engagés. Et nos missions exigent de plus en plus de formations et de perfectionnement pour maintenir les acquis en cours d’engagement. Tout cela est donc forcément chronophage, plus qu’autrefois.

Comment analysez-vous cette évolution ?

Il y a une évolution générationnelle dans la société. Beaucoup ont envie de passer à autre chose au bout d’un certain temps. De préserver leur vie de famille et leurs moments de loisirs. Et puis le monde du travail évolué lui aussi différemment d’autrefois, nécessitant plus de contraintes. D’ailleurs, pour les employeurs, laisser sortir les volontaires en journée pour assurer une intervention n’est pas automatique. Nous avons donc mis en place des conventions avec certains, 250 à ce jour, pour assurer cette disponibilité… encore faut-il que ce soit possible avec un centre de secours sur place. Au final, la durée moyenne d’engagement des volontaires est donc aujourd’hui de 10 à 11 ans en moyenne alors que par le passé, il n’était pas rare de voir des gens partir au moment de la retraite seulement après 30 à 40 années de carrière.

Quels facteurs expliquent l’inflation des interventions ?

Ils sont protéiformes et constituent de vraies évolutions sociétales : individualisme remplaçant progressivement la solidarité humaine, consumérisme exacerbé du service public (le fameux « j’y ai droit »), vieillissement de la population maintenue à domicile et, en ville comme dans les zones rurales, beaucoup de nos sorties sont générées d’une part par le manque cruel de médecins et d’autre part par ce qu’on appelle les carences d’ambulances privées. Ces entreprises gèrent en effet ce qu’on appelle les transports programmés depuis ou vers les hôpitaux, mais doivent aussi règlementairement participer à l’urgence préhospitalière… quand c’est possible. Les conditions financières qu’on leur impose et leurs difficultés de recrutement font que trop souvent les pompiers sont sollicités à leur place car ils ne peuvent pas répondre aux demandes du « centre 15 » du SAMU. Un accord expérimental a été trouvé en avec l’Agence Régionale de Santé et l’Association des ambulanciers privés (ATSU 25) pour diminuer la pression qui pèse sur nos épaules… D’autre part, un décret datant du 22 avril vient réformer le transport sanitaire urgent. C’est un texte qui était très attendu par les ambulanciers

Comment le volontariat peut-il évoluer ?

Jusqu’à aujourd’hui, un sapeur-pompier volontaire devait être formé afin de pouvoir assurer l’ensemble de nos missions, dont le spectre est très large, et par conséquent être formé pour l’ensemble. Le tout en un à trois ans maximum. Mais nous souhaitons totalement changer de paradigme en permettant à ceux qui le souhaitent de signer pour un engagement dit « différencié ». Donc seulement pour certaines missions, selon leurs compétences, leur disponibilité et leurs souhaits. Il sera par exemple possible de rejoindre une caserne uniquement pour assurer du secours à victimes, ou seulement pour lutter contre les incendies, voire même pour être spécialiste conducteur d’engin-pompe et d’échelle aérienne par exemple s’il y a un besoin crucial dans une caser en journée ouvrable par exemple. Forcément, ces personnes donneront moins de leur temps mais leur présence sera un précieux renfort pour finalement couvrir localement l’intégralité de nos missions.  Certaines se prendront également certainement « au jeu » pour progressivement prendre un engagement complet comme leurs camarades.