Nombreux sont les acteurs locaux concernés par la visite de Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles. Un si large portefeuille de responsabilités rassure peu, chacun cherchant à éviter d’en être le parent pauvre. En organisant sa journée dans le Doubs, la locataire de l’Avenue Duquesne n’a voulu oublier personne. D’abord avec la casquette de la Santé en visitant la Maison de santé pluriprofessionnelle (MSP) dans le quartier Saint-Claude, puis avec celle du Travail, au pôle de formation de l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) Franche-Comté, basé à Temis.
Le danger de la baisse des aides à l’apprentissage
Sur place, le parterre de chefs d’entreprise réuni autour de Jean-Luc Quivogne, président de l’UIMM Bourgogne Franche-Comté, attend la ministre avec trois grandes revendications : la simplification administrative, la formation et l’amélioration de l’attractivité des métiers. Catherine Vautrin prend note des attentes d’une économie en difficulté, sans réelle visibilité et confrontée à la concurrence proche de la Suisse, souvent présentée comme un aspirateur à emplois qualifiés. Claudy Broutin, directeur général de KH-Velux, un site implanté à Marnay (70) et qui emploie plus de 250 salariés, évoque les dangers d’une baisse des aides à l’apprentissage avec une double peine : les entreprises voient les aides de l’État rognées et les apprentis perdent du pouvoir d’achat, impactés par la nouvelle loi de financement de la sécurité sociale. « Un sujet majeur », pour Catherine Vautrin, rappelant « que le président de la République a créé 850 000 apprentis en 2024. La réduction des aides est liée au contexte économique. Nous sommes passés d’une prévision de croissance de 0,9 à 0,7%… il faut trouver des économies ».

« Nous avons beaucoup recruté en 2024 et un programme immobilier est prévu en 2025. Nous investissons dans l’humain au travers de la formation. Les promesses d’un investissement fort dans l’armement peuvent sembler positives pour nous… mais à quel délai ? », ajoute Raoul Barthez, dirigeant de DIXI Microtechniques. L’entreprise installée à Marchaux-Chaudefontaine, est spécialisée dans des secteurs à forte technicité et travaille notamment pour l’industrie de la Défense. Elle emploie 45 salariés. « Je vais remonter l’information », se contente la ministre, avant de rassurer Damien Tournier, président de l’école de production de Besançon et inquiet pour la pérennité du site. « Il y a 75 écoles de production en France. C’est une réussite d’intégration et nous continuerons à les soutenir et les accompagner ».
Une troisième visite ministérielle en trois mois
Des réponses claires, d’autres plus alambiquées, comme celle apportée à Jean-Luc Quivogne, au sujet des normes toujours plus étouffantes : « le Code de l’environnement est passé en quelques années de 1000 à 7000 normes. Notre code du travail fait 3 600 pages alors que celui de la Suisse en compte 200 », souligne le président de l’UIMM Bourgogne Franche-Comté. « Vous avez largement raison Monsieur le président Quivogne…nous travaillons sur le sujet… il y a clairement besoin de simplification administrative », répond Catherine Vautrin, avant d’évacuer en évoquant les indemnités journalières. Soucieuse d’afficher une proximité avec ses interlocuteurs, la ministre répond à l’aide de ses connaissances et quelques éléments de langages travaillés en amont. Pas de fiches, ni de discours déjà préparé. Si le choix oblige à quelques pirouettes, il reste relativement apprécié, tout au long de la journée. En face, les industriels réunis à l’UIMM démontrent une belle solidarité pour défendre l’économie du territoire.

Dépasser les clivages autour de Paulette Guinchard
La situation politique française sort difficilement d’une crise ayant poussé le gouvernement de Michel Barnier vers la sortie avant de plonger celui de François Bayrou dans la tourmente. Entre la construction d’un budget national en urgence et une situation géopolitique historique, c’est la troisième visite ministérielle en trois mois, après Annie Genevard et Thani Mohamed Soilihi. Catherine Vautrin mise sur l’apaisement et le dialogue. Un choix autrement plus simple à porter l’après-midi, lors de l’Inauguration de l’Institut de formation professionnel de santé (IFPS) Paulette Guinchard (voir pages locales édition Grand Besançon). Devant le monde politique local, passé et actuel, venu en masse pour rendre un nouvel hommage à l’ancienne secrétaire d’État aux Personnes âgées, l’actuelle ministre salue « l’adversaire sur l’échiquier politique » avec qui elle apprend au fil du temps à se sentir « proche d’elle ». « Ce franc-parler, allié à une profonde humanité, lui a valu l’estime de tous, au-delà des clivages politiques. Elle avait ce don rare de créer des connexions sincères avec tous ceux qui ont eu la chance de la côtoyer. […] Cette femme s’est consacrée aux autres, c’est très inspirant pour tous les élèves formés ici ».
L’IFPS a aussi un lien direct avec la rencontre organisée à l’UIMM. « C’est l’avenir du territoire qui se joue avec ce type d’établissement. L’Université et sa qualité de formation sont toujours mises en avant par les industriels. L’humain présent sur le territoire fait la force, la fortune et la fierté du secteur. »
Y.Q et M.S
Les oubliés du Segur bientôt revalorisés ?
En juin 2024, Catherine Vautrin, déjà au même poste au sein du gouvernement de Gabriel Attal, signe avec les partenaires sociaux une extension de la revalorisation du Ségur. L’ensemble des professionnels non concernés jusqu’à présent doit percevoir une prime supplémentaire de 183€ net par mois. Charge aux départements d’assumer financièrement cette augmentation, annoncée « sans la moindre concertation » rappelle Christine Bouquin, présidente du conseil départemental. Pour le Doubs, la note s’élève à 1,7 million d’€. Le 11 septembre, les Départements de France annoncent le gel de cette revalorisation, en attendant « une mesure de compensation urgente et intégrale de l’État aux départements ». À l’IFPS ce lundi 17 mars, Catherine Vautrin est revenue sur le sujet : « j’ai rendez-vous ce mardi avec les Départements de France pour évoquer ces sujets et début avril avec le comité des financeurs. L’ancien chef de cabinet de Paulette Guinchard a rappelé comment la politique de l’APA a été conduite, sur un partage du surcoût entre le Département et l’État. Nous restons dans cette logique pour ce dossier ».