L’Académie française s’émeut : l’anglais envahit notre vocabulaire. On y perd son latin et les Immortels sont au bout de leur vie : on ne sait plus parler français qu’en anglais ! Et l’on cite en exemple le cash, le drive, ouigo, le black Friday, le burn-out, le click and collect…
Pour beaucoup ce pillage est une bonne nouvelle puisqu’il donne du grain à moudre à notre passe-temps favori (bien loin devant la marelle, la belote coinchée et le Cochon qui rit®) : l’autoflagellation de toute une nation. Des français archinuls, ankylosés des bonheurs de la vie, victimes de tous et de tout et résolus à le rester pour s’en plaindre en toutes occasions.
Pourtant nous aurions de quoi nous consoler. Car si l’on emprunte à l’anglais jusqu’à s’en hérisser le poil, l’anglais nous emprunte tout autant. Dans le Robert&Collins, dictionnaire de référence, on apprend que les anglais lorsqu’ils souhaitent se rencontrer se donnent un « rendez-vous ». Ce grand mot est à ce point de chez nous qu’on peine croire en cette rapine mais pourtant ils poussent l’audace jusqu’à se le conjuguer tranquillou, pas vu, pas pris. Ainsi, « they rendez-voused with the patrol », signifie « ils ont rejoint la patrouille ». Voici nos voisins d’outre-manche pris par la patrouille, la main dans le sac et en flag de nous dérober sans vergogne les belles expressions de chez nous. Une outrecuidance intraduisible en anglais…
Ainsi, preuve est faite que les maraudes se font dans les deux sens.
Mais nous avons cet avantage, nous autres ex-gaulois, d’être aussi désespérés quand nous pillons que quand on nous pille. C’est ce qui fait notre supériorité sur tant de peuples qui font paisiblement leur vie sans même mesurer l’étendue de leur malheur.