Railcoop, chronique d’une catastrophe annoncée

Le 15 avril 2024, le tribunal de commerce de Cahors va très probablement prononcer la liquidation judiciaire de la coopérative Railcoop, créée en 2019 à Figeac (Lot).

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Cette liquidation judiciaire annoncée sera une perte sèche pour les 14 000 sociétaires privés et les dizaines de collectivités locales de la coopérative. Railcoop avait mis en service en 2021 une ligne de fret entre Decazeville (Aveyron). La ligne a dû cesser son activité en avril 2023, constatant un gouffre financier de plus de 5 millions d’euros et l’impossibilité à démontrer la pertinence du modèle économique, recentrant son projet sur le trafic voyageurs entre Bordeaux et Lyon.

Le rêve de l’économie sociale et solidaire a vite tourné au cauchemar ! L’activité ferroviaire est fortement capitalistique. Il faut investir beaucoup avant de faire monter le premier voyageur dans le premier train…Le coût du matériel est exorbitant et les contraintes de fonctionnement multiples, en particulièrement dans la négociation des sillons disponibles avec SNCF Réseau.

Railcoop avait opté pour l’achat de rames d’occasion auprès de la Région Auvergne Rhône Alpes. En outre, la coopérative devait la coquette somme de 880 000€ à une société de Clermont-Ferrand en charge du parcage des rames avant leurs mises en service. Condamnée à payer cette somme, Railcoop n’avait pas d’autre solution que d’être placée en redressement judiciaire en 2023.

Il fallait également que le projet d’une ligne voyageurs entre Bordeaux et Lyon réponde effectivement à un besoin commercial et non à une idéologie « Nous avons développé Railcoop là où les autres ne voulaient pas aller… » argumentait un cadre de la coopérative. Un peu présomptueux sur une ligne qui accumulait les difficultés : une infrastructure dégradée, de faibles prévisions de remplissage des rames et un temps de trajet insupportable (environ 8h).

Clap de fin pour Railcoop

La coopérative qui se voulait le chantre de l’économie citoyenne, aura tenté jusqu’au dernier moment de faire un pacte avec le diable (entendez des fonds d’investissement privés). Le 15 avril 2024, le tribunal de commerce de Cahors sifflera la fin d’une récréation qui coûtera des millions d’euros aux 14 000 sociétaires et à des centaines de milliers de contribuables de nombreuses collectivités dont une en Franche-Comté (la municipalité de Luxeuil-les-Bains, pourtant bien loin du massif central, avait souscrit des parts dans Railcoop).

Yves Quemeneur