Gérald Darmanin était tellement sûr de faire voter son projet de loi immigration, qu’avant de faire le coq sur les plateaux TV, le ministre a validé un projet de cartes de vœux pour 2024, année Olympique, où l’on voit Marianne en pleine course, enjambant une haie nommée « Loi immigration », chaque obstacle portant le nom d’un événement marquant passé ou à venir (révélations Canard Enchaîné du 13/12). Présomptueux, tant la chute de Gérald Darmanin fut importante ce lundi 11 décembre. Dans une assemblée quasi-comble et bouillonnante, les députés ont voté d’une courte majorité la motion de rejet du projet de loi. Face à un ministre de l’Intérieur livide, désemparé, les scènes de liesses sur les bancs des groupes d’oppositions dénotent avec la réalité du chemin parlementaire.
Sans revenir sur le fond de ce texte, personne n’a « gagné ». Le gouvernement est renvoyé dans les cordes sur l’un des grands projets du second mandat d’Emmanuel Macron. C’est surement pour cette raison que le Président a refusé la démission de son ministre de l’Intérieur. Pas question d’une dissolution de l’Assemblée, voulue par la gauche et l’extrême-droite, la bataille n’est pas terminée. À droite, si certains députés jugeaient ce texte trop laxiste alors que les amendements du Sénat avaient tous ou presque été supprimés, ce vote est d’abord politique : signer la mort de Gérald Darmanin, le traitre. Avec le ministre affaibli, les LR affirment leur force dans l’hémicycle et pourront toujours obtenir un texte à leur convenance car, majoritaires au Sénat, la droite l’est aussi en commission mixte paritaire (CMP). Cette option privilégiée par le gouvernement pour faire passer son texte, au risque de le voir complètement changé et surtout durci, réunis 7 députés et 7 sénateurs à huis clos pour tenter de trouver un compromis.
Vous l’aurez compris, à gauche, la fête s’est très vite transformée une nouvelle fois en sourire amer. Que retenir chez eux ? Qu’avec cette motion, la volonté d’annuler cette loi pourrait permettre au camp opposé de la modifier à sa guise. « Cheh Darmanin », postait Sandrine Rousseau dans la foulée de ce rejet, sur X ex-twitter. Comprenez « bien fait » en langage « d’jneus ». Gênant et surtout réciproque. En cas d’échec de la CMP, reste alors la carte magique du 49.3 mais en pareille crise, un tel choix pourrait être fatal au gouvernement qui s’exposerait à une motion de censure plus que probable dorénavant.