Voici un jeu qui vous régalera si vous avez fait le tour du mikado et des petits
chevaux. Prenez nos cinq voyelles. Cinq c’est beaucoup : ajoutez un « S »… Touillez
en faisant revenir à feu doux. Étalez promptement sur une surface que vous aurez
préparée à cet effet. Touillez encore obstinément jusqu’à obtenir le mot « OISEAU ».
Aujourd’hui l’altercation est un mode de communication privilégié. Échanger des
noms d’oiseaux est une activité très prisée. Souvent gratuite à plus d’un titre.
Si vous êtes une femme vous connaissez les noms d’oiseaux qui vous
correspondent le mieux : bécasse, buse (triple buse si votre interlocuteur a de gros
moyens), poule mouillée ou même grue, dinde, autruche, oie blanche…
Pour un homme, il y a tout autant de choix : vautour, corbeau, pigeon, rapace, butor.
Attention, butor est vieillot. À réserver à un vieil oncle ou à un rustre dans la force de
l’âge. Inutilisable dans les collèges où l’on trouve plutôt des perdreaux de l’année et
des têtes de linotte.
De quel droit sommes-nous si sévères avec ces innocents volatiles pour ainsi les
comparer aux abrutis qui nous entourent ?
D’après les dictionnaires historiques se donner des noms d’oiseaux ne date que du
XIXème siècle. On imagine la difficulté de nos ancêtres quand ils souhaitaient se
mépriser les uns les autres. C’est cette carence en noms d’oiseaux qui a conduit
certains, à leur corps défendant, à puiser dans les parties vulgaires de leur anatomie
pour survivre à la pénurie. Ainsi sont nés couillon, connard, trou du cul et d’autres
qualificatifs abjects avant que les noms d’oiseaux prennent enfin leur envol.
Décidément ceux qui prétendent à longueur de temps que c’était mieux avant ont un
fameux toupet.
Par le Docteur Gérard Bouvier