Combien de lynx compte-t-on dans nos forêts comtoises ?
L’office français de la biodiversité, l’OFB, estime qu’il y a entre 150 et 200 lynx en France, en grande majorité dans le massif jurassien. Ce chiffre est le résultat d’un suivi rigoureux donc incontestable même si ceux qui veulent éradiquer le lynx estiment sa population plus nombreuse, trop selon eux. Cette présence du lynx est en stagnation et c’est inquiétant.
Par quoi est-il menacé ?
La génétique est un souci. Depuis sa réintroduction par la Suisse dans les années 70, une action qui a profité à tout le massif du Jura, la reproduction s’est faite qu’à partir des individus venus d’Europe de l’Est. La consanguinité n’a fait que se poursuivre au fil du temps et met clairement l’espèce en danger ici. La perte de diversité génétique, pourrait selon les estimations scientifiques faire disparaître le lynx dans la région dans moins de 30 ans. Il faut donc en réintroduire d’urgence !
Vous demandez donc de réintroduire de nouveaux lynx ?
Oui ! Des individus venus d’autres régions afin de favoriser le brassage génétique et voir leur population croitre à nouveau dans le massif. Le sujet est d’ailleurs abordé dans le Plan National d’Actions en faveur du Lynx, un document où le Lynx boréal a été identifié comme espèce prioritaire pour l’action publique au regard de son statut d’espèce protégée et menacée.
Existe-t-il d’autres menaces ?
Il y a aussi du braconnage il ne faut pas le nier et malheureusement les collisions routières de plus en plus nombreuses. Et ce n’est pas dû à l’augmentation de la population de lynx mais à l’intensification de la circulation routière avec des axes qui traversent l’habitat du lynx. On dit souvent que ce n’est pas le territoire du lynx qui coupe celui de l’homme mais le contraire.
Quelles solutions proposez-vous ?
Il faudrait réduire la vitesse dans les zones qu’il fréquente et que les automobilistes soient plus vigilants. Le centre Athénas propose par exemple des panneaux qui signalent la présence du lynx pour inciter à la prudence, c’est un bon moyen de faire comprendre que la présence du lynx est une chance et qu’il faut être attentif.
Ce n’est pas l’avis de tous…en quoi est-ce une chance ?
Déjà pour la biodiversité. La présence du lynx a en effet un impact en tant que grand prédateur. Sur son territoire, les proies comme les chevreuils ou chamois sont moins concentrées, plus dispersées ce qui entraîne moins de broutage et de piétinement de la végétation. Il régule donc les populations de cervidés, et en évitant une surpopulation il y a moins de dégâts et plus de régénération en forêt. D’autres espèces animales et végétales peuvent aussi y prospérer. Il a donc un rôle important pour l’équilibre des écosystèmes forestiers.
Pourtant, certains contestent toujours son utilité. Que faites-vous pour les convaincre ?
Férus qui est une association nationale pour la défense et la sauvegarde des grands prédateurs, a des bénévoles comme moi qui occupent le terrain pour faire connaitre et accepter le lynx. Nous menons des actions de terrain, par exemple un programme intitulé « Parole de Lynx ». En pratique, une équipe va à la rencontre des habitants et touristes sur les marchés, les fêtes, distribue des plaquettes d’information et invite les personnes à répondre à quelques questions afin de recueillir sur le lynx.
Alors ? Est-il admiré, toléré, craint ?
D’abord, on constate que les habitants du massif jurassien connaissent la présence du lynx pas loin de chez eux. En grande partie, ils sont bienveillants et fiers d’avoir cet animal dans leur environnement. Les touristes sont plus étonnés et ont souvent des questions sur la dangerosité de l’animal en cas de rencontre en forêt. On fait donc de la pédagogie et on les rassure en répétant que le lynx ne s’attaque pas à l’homme. Il n’y a aucun danger. Certes il ne fuira pas car il est avant tout curieux mais l’homme n’est pas une proie pour lui. Et si vous en croisez un, dites-vous que vous êtes privilégié car le plus souvent, lui vous voit mais vous ne le voyez pas !