Quelle que soit l’issue des résultats ce dimanche 30 juin puis au soir du 7 juillet, la politique française vit une période extraordinaire, imprévisible, même pour les plus grands suiveurs. Au regard de la déflagration à droite, des multiples explosions à gauche, la « grenade » présidentielle « dégoupillée dans les jambes » de ses adversaires semble avoir fonctionné. Son impact est davantage décuplé par le comportement inimaginable de ses opposants.
Qu’importe pour le Président de la République si les dommages collatéraux de cette dissolution touchent ses soldats. Dans le Doubs, le premier à en avoir fait les frais est Éric Alauzet, député sortant de la 2e circonscription. Après avoir précipitamment annoncé sa candidature, le médecin investi par la majorité présidentielle s’est retracté, laissant place à un profil plus jeune, le maire de Saône Benoît Vuillemin (Renaissance, voir pages locales Grand Besançon). Dans son communiqué, Éric Alauzet justifie publiquement son choix par une fatigue grandissante de travailler au cœur d’une majorité relative, « dans une ambiance dégradée » par les attaques répétées de La France Insoumise et du Rassemblement National. En coulisse les théories fleurissement quant à ce revirement : la candidature de son ancien mentor Dominique Voynet (EELV/Nouveau Front Populaire, voir pages locales Grand Besançon) a-t-elle rendu impossible celle du député sortant ? Plus populaire localement Benoît Vuillemin a-t-il manoeuvré en coulisse après le choix du bureau national qui l’avait pourtant écarté ? Ce n’est pas le seul fait politique à avoir alimenté les dix premiers jours d’une campagne express.
Face à la menace de l’extrême droite au pouvoir, la majorité présidentielle comme plusieurs figures chez Les Républicains opposés au « putsch » d’Éric Ciotti, ont appelé à « s’entendre » sur certaines circonscriptions, y compris dans le département. C’est en tout cas ce qu’espérait Benoît Vuillemin avant d’apprendre la candidature de Daniel Roy (LR) dans cette 2e circonscription (Besançon Est). À l’inverse dans la 1ère circonscription (Besançon Ouest), le député sortant Laurent Croizier (Modem, voir pages locales Grand Besançon) n’a aucun candidat LR face à lui. Le troisième député sortant de la majorité présidentielle Nicolas Pacquot (Horizons), s’oppose à Matthieu Bloch, secrétaire départemental des Républicains qui a préféré rejoindre Éric Ciotti et reçoit donc le soutien du RN. Des mouvements de déstabilisation, des choix personnels ou stratégiques en vue de futures élections locales…
« Il n’y a jamais eu d’accord », tonne Annie Genevard (LR, voir pages locales Haut-Doubs) secrétaire générale du parti Les Républicains et députée sortante dans la 5e circonscription du Doubs. Tout en distribuant quelques vérités : « Emmanuel Macron porte une large responsabilité sur la situation de notre pays. On ne peut pas être comptable de son bilan, ni de celui de ses députés. Si nous n’avons pas pu mettre des candidats partout, c’est d’abord en raison de la précipitation de ces élections. Des candidats, comme Matthieu Bloch (candidat dans la 3e circonscription) ont préféré s’allier avec le RN et Éric Ciotti. À l’inverse dans la 4e circonscription du Doubs, Philippe Gautier était pressenti pour nos couleurs et a finalement choisi Horizons. On a fait comme on a pu, cette confusion a freiné beaucoup de candidats potentiels, finalement nous en avons près de 400. »
Est-ce alors la raison de la candidature très tardive – et alors qu’aucun représentant de la majorité présidentielle n’était prévu pendant près d’une semaine dans la 5e circonscription – du jeune Lucas Boillot (voir pages locales Haut-Doubs) investi par Renaissance ? Dans le Haut-Doubs, Annie Genevard doit également faire face à Florianne Jeandenand (voir pages locales Haut-Doubs) candidate du Rassemblement National, qui espère surfer sur le score historique des élections européennes. L’ambition du parti est sans limite, avec des candidats partout : Thomas Lutz (1ère), Éric Fusis (2e), Matthieu Bloch (3e, LR soutenu par le RN) et Géraldine Grangier (4e), députée sortante. « Honnêtement aujourd’hui, toutes les circonscriptions sont prenables, en tout cas avec une place au second tour. », se félicite Jacques Ricciardetti, référent départemental du parti présidé par Jordan Bardella.
À gauche, au niveau national le Nouveau Front Populaire apparaît fébrile. Les manœuvres de Jean-Luc Mélenchon avec l’aide de ses plus proches soutiens s’opposent aux autres partis soutenus par des figures de la France Insoumise, François Ruffin en tête. Localement toutefois, l’union tient. Europe Écologie Les Verts a récupéré la 2e circonscription avec Dominique Voynet, au détriment du Parti Socialiste, incapable de proposer localement un nom aussi solide. Dans la 1ère circonscription, la battante Séverine Veziès (LFI/Nouveau Front Populaire, voir pages locales Grand Besançon). Les deux candidates veulent toutefois mener une campagne quasi-commune, pour les rendez-vous bisontins. On retrouve également La France Insoumise pour le nouveau Front Populaire avec Matthieu Cassez dans la 5e. Le PS est présent avec Magali Duvernois (4e) tout comme le Parti Communiste représenté par Virginie Dayet (3e).
Malgré l’annonce nationale du NPA rejoignant le Front Populaire, on trouve une candidature dissidente dans la 1èrecirconscription avec le bibliothécaire retraité Alain Ruch (NPA). Autre refus de collaborer avec le nouveau Front Populaire, celui de Lutte Ouvrière (voir pages locales) qui présente des travailleuses et travailleurs partout : les indéboulonnables Nicole Friess (1ère) et Brigitte Vuitton (2e) sur Besançon, les ouvriers Stellantis Franck Plain (3e) et Michel Treppo (4e) sur Montbéliard et l’enseignante Sonya Morrison (5e) dans le Haut-Doubs. D’autres candidatures symboliques font partie des 28 noms déposés en Préfecture : la plus jeune est celle du lycéen Nolann Laurent (5e, sans étiquette), 18 ans. Suffisant pour gagner ?
M.S