Pendant plus d’une semaine, les adhérents de l’association Soma Tsara Besancon, le club de football créé par plusieurs joueurs mahorais et qui ne compte quasiment que des joueurs originaires de Mayotte, sont restés dans le flou. Les nouvelles de chaque famille sont arrivées au compte-goutte, à mesure que l’électricité et les réseaux de télécommunications revenaient sur l’île. « J’ai eu ma famille 2 minutes au téléphone quelques jours après la tempête. Ma sœur a dû marcher plusieurs heures pour avoir du réseau et donner des nouvelles. », souffle El Enrif Ben Souffou alias ‘Ben’, entraîneur du club et connu par de nombreux amateurs du ballon rond dans le Doubs. Par chance, leur maison a tenu le coup, face aux puissantes rafales de vent. D’autres familles d’adhérents ont perdu beaucoup plus.
Le 26 décembre, près de deux semaines après le passage du cyclone Chido, la préfecture de Mayotte recense officiellement 39 morts et 4 136 blessés légers et 124 blessés graves, selon le ministère de l’Intérieur. Des lieux restent encore inaccessibles. « Et beaucoup de gens sur place ne voient pas la couleur de l’aide annoncée », peste El Enrif Ben Souffou. Au club, les derniers entraînements de l’année ont été annulés et remplacés par des actions solidaires. Directeur adjoint du groupe scolaire de Serre-les-Sapins, ‘Ben’ a fait marcher ses contacts pour obtenir une salle de stockage grâce à la commune, afin d’entreposer les dons récoltés. Denrées alimentaires non périssables, vêtements, fournitures scolaires, produits d’hygiène, etc. Le club de football d’Avanne-Aveney compte également une dizaine de joueurs seniors mahorais et s’est associé à Soma Tsara Besançon pour donner d’autres fournitures. Beaucoup de joueurs font partie du 19 Régiment du Génie à Besançon ou du 13e RG à Valdahon. Les dons récoltés seront ainsi acheminés le 15 janvier par un vol militaire. « Ça commence à aller mieux », résume le président de Soma Tsara Besançon, encore étonné des indications de certains élus bisontins : « on m’a très vite expliqué que le matériel ne servait à rien et qu’il fallait donner de l’argent à la Fondation de France. Mais nos licenciés ont des nouvelles en direct de leur famille et de la situation. Beaucoup n’habitent pas à Mamoudzou, la capitale où est centralisée l’aide. On ne sait pas à quoi va servir cet argent alors que nos dons iront directement aux habitants. »
Dominique Voynet : « la France n’a pas la culture du risque »
La députée écologiste Dominique Voynet connaît aussi bien la situation. Première directrice de l’Agence Régionale de santé (ARS) à Mayotte entre 2020 et 2021, l’élue échange régulièrement avec des proches installés sur l’île. « Les dons financiers restent le moyen d’aider le plus rapidement car l’argent arrive dans les mains de personnes déjà mobilisées sur place », répond la députée. « La situation à Mayotte montre néanmoins que la France n’a pas la culture du risque. C’était déjà le cas lorsque j’étais là-bas. On a quelques unités spécialisées, mais ce n’est pas assez. On a un seul hôpital de campagne déployable en cas de crise avec trois unités de dix lits. […] Désormais, il faut reconstruire Mayotte mais pas à l’identique, la vulnérabilité est bien trop grande. », commente la députée, agacée par l’excès de communication politique et les termes employés. « On parle d’une catastrophe qui n’a rien de naturelle. Les scientifiques montrent que les cyclones vont être plus nombreux, plus intenses et avec des trajectoires différentes de ce que l’on a connu. Tout cela accéléré par le changement climatique. »
Dons financiers des collectivités
Quelques jours après la catastrophe, les collectivités publiques départementales ont apporté leur soutien en versant une somme à la Fondation de France, chargée de regrouper les dons. 10 000€ de la part du Département du Doubs, 20 000 € votés par le conseil communautaire du Grand Besançon, la même somme prévue par le conseil municipal bisontin et versée après le vote lors de la séance plénière de janvier. La communauté de Communes du Grand Pontarlier (CCGP) a voté à l’unanimité une subvention exceptionnelle de 3000€ pour venir en aide à Mayotte. « On est très nombreux à avoir une pensée pour ce qui se passe à Mayotte. C’est une catastrophe. Alors [3000€] c’est peu, c’est beaucoup, faut le faire, ne pas le faire… je pense aussi que c’est pour marquer notre solidarité et avoir une pensée pour ces personnes qui sont dans la plus grande des misères », souligne Patrick Genre, président de la CCGP.
Le 23 décembre, le préfet du Doubs Rémi Bastille organisait une minute de silence dans la cour de la Préfecture, aux côtés d’élus et mahorais. Une action symbolique qui a permis à la communauté mahoraise de se faire connaître. De son côté, El Enrif Ben Souffou prévoit déjà d’y retourner cet été avec plusieurs autres membres de son association.
La Croix Rouge de Pontarlier et le collège de Mouthe se mobilisent pour aider Mayotte
Bien que l’archipel soit à plus de 7 000 km, sa situation ne laisse pas indifférent le Haut-Doubs. La Croix-Rouge française indique que des dons peuvent être versés sur leur site internet. Pour les personnes moins à l’aise avec l’informatique mais qui veulent quand même être solidaires, il est possible de se rendre dans les locaux de l’Unité locale de Pontarlier et du Haut-Doubs forestier, Place Jules Pagnier, du lundi au vendredi de 9h à 12h et de 14h à 17h, pour y déposer un don. Au moins trois bénévoles de cette unité locale vont également se rendre directement sur place.
De son côté, le collège de La Source à Mouthe va organiser différentes actions juste après les vacances scolaires pour récolter des fonds avant de les reverser à La Croix Rouge. Des gâteaux confectionnés par le personnel du collège seront vendus au sein de l’établissement. Une tombola sera également réalisée. « On va faire appel aux commerçants du secteur pour offrir des lots. Deux réunions parents-profs sont organisées à la rentrée et permettront aux parents d’acheter des tickets de tombola », précise Stéphanie Coulon, principale adjointe du collège. Certains élèves souhaitent confectionner d’autres petits objets afin de les mettre en vente : bracelets, cartes de vœux etc. Ce n’est pas la première fois que le collège de Mouthe est solidaire. Des initiatives similaires avaient déjà été mises en place il y a deux ans pour les sinistrés en Turquie.
M.S et C.T