Rubrique. Le Coin Lecture d’Isa : Carcoma, de Layla Martínez

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Dans une demeure où les murs murmurent les secrets du passé,
Layla Martínez explore le tourment de femmes prisonnières d’un
héritage lourd entre révolte silencieuse et énigmes perturbantes.
Éditions Seuil.

Imaginez une maison. Non, plutôt une vieille bâtisse. Une carcasse de
briques pourries qui respire comme un monstre affamé. Une maison qui
grince, qui suinte l’angoisse, qui avale ceux qui osent franchir son seuil.
« Quand j’ai franchi le seuil, la maison s’est jetée sur moi. » Dès cette
phrase d’ouverture, Layla Martínez pose son piège. Vous sentez que
vous n’en sortirez pas indemne, que ce roman va vous saisir à la gorge
et ne jamais relâcher son emprise.

Au cœur de cet antre oppressant, deux femmes : une grand-mère qui
parle aux ombres et sa petite-fille qui revient après un drame, cherchant
refuge dans ce piège .
Toutes deux sont les héritières d’un passé qui pèse, d’un héritage de
souffrance.
Ici, les hommes disparaissent rapidement, consumés par une
malédiction silencieuse. Ici, la maison garde tout : les cris étouffés, les
injustices figées dans ses murs, et cette douleur qui s’infiltre comme un
poison.

L’autrice ne se contente pas de réinventer la maison hantée. Elle en fait
un symbole. La bâtisse devient une allégorie monstrueuse des violences
sociales et patriarcales. Les femmes y sont enfermées, prisonnières d’un
cycle infernal. La maison grince, tremble, respire leur colère étouffée.
Elle est une mémoire toxique, un lieu où les morts refusent de partir et
où chaque génération porte les blessures de la précédente.

Carcoma est bien plus qu’un simple conte noir.

C’est un roman habité par une rage politique, un texte qui hurle contre
les injustices sociales et la violence des privilèges. Layla Martínez, avec
une plume acérée et furieuse, mêle poésie et crudité dans une prose qui
frappe aussi fort qu’un uppercut. L’atmosphère est suffocante,
hypnotique. On avance dans cette maison, terrifié et fasciné.

Et la fin ? Elle vous retourne, sauvage et amorale.
L’autrice transcende les frontières du genre pour livrer un roman qui
dévore tout sur son passage. Carcoma est une expérience sensorielle,
un cri qui vous suit longtemps après la dernière page. Un texte qui
gronde, envoûtant et qui ne vous laissera pas indemne.

Isa sur Insta : lodyssee_des_mots