Doubs. Nos ponts tiennent-ils le coup ?

Depuis quatre ans, le programme national Ponts recense les ouvrages d’arts français au niveau communal et leur état de santé, parfois critique. Un diagnostic jamais réalisé auparavant à une telle échelle, qui débouche aujourd'hui sur une aide financière pour les communes afin de maintenir ces axes de circulation essentiels, tout en assurant la sécurité des habitants. Un dossier piloté et suivi de près par le sénateur du Doubs Jean-François Longeot.

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Datant de 1862, le pont de l'Ascension à Rennes-sur-Loue a été rénové en 2023 et va bénéficier de l'appui du programme national Plan Ponts 2 ©YQ

L’actualité des dernières semaines est marquée par d’importantes crues et inondations à travers le monde, provoquant de graves dégâts matériels et surtout humains comme en Espagne (lire édito, ndlr). Parmi les secteurs en lien avec l’eau et surveillés attentivement , les ponts français font l’objet d’un diagnostic récent et déterminant quant à l’avenir de nos territoires et la sécurité des habitants. « C’est après la catastrophe de Gênes en 2018 qu’une prise de conscience nationale est née », glisse Jean-François Longeot, sénateur doubiste depuis 2014 et surtout président de la commission d’aménagement du territoire et du développement durable. L’effondrement d’une partie du viaduc de Polcevera en Italie, provoquant la mort de 43 personnes et faisant 16 blessés, déclenche en France un grand recensement des ouvrages d’arts dans l’Hexagone. « C’est dramatique de se dire qu’il faut des morts pour bouger. Avec ce diagnostic on a pu faire un inventaire assez complet tout en découvrant à qui appartenait la gestion de ces ponts », poursuit le sénateur. Les élus découvrent que si les Départements étudiants autres collectivités gèrent leurs sites, de nombreux ouvrages d’art détenus par de petites communes demandent à être rénovés ou entretenus, au risque de s’effondrer. Le projet porte un nom : le programme national Ponts.

Un diagnostic urgent, un bilan mitigé

À l’intérieur, une mission confiée au Cerema, établissement public créé en 2014 et regroupant lui-aussi tous les centres d’études et services liés aux ponts, constructions publiques et techniques fluviales, détaille doncle patrimoine communal, jusqu’ici inconnu. Des ponts souvent plus dégradés que d’autres ouvrages à la charge de collectivités détenant plus de moyens pour de potentiels travaux. Résultat en 2020, 45 894 ouvrages communaux sont recensés en France dont 29 314 ponts et 16 581 murs de soutènement routier. Parmi eux, 26 % des ponts et 41 % des murs sont en bon état. Ces ouvrages doivent faire l’objet d’une surveillance et d’un entretien régulier. « 25 % des ponts et 14 % des murs présentent des désordres structuraux significatifs ou majeurs », nécessitant des études plus précises pour engager des réparations, note le rapport. Plus grave, « 10% présentent des problèmes de sécurité nécessitant une action immédiate. Dans la majorité des cas, il s’agit d’actions liées au mauvais état des équipements », poursuit le Cerema, avant d’assurer que 4 % des ouvrages français présentent des risques trop grands, obligeant les collectivités à limiter le tonnage ou à interdire l’accès.

Quatre ans après ce diagnostic les premiers chantiers de sécurisation ont été réalisés quand d’autres mesures ont également été prises localement. « Dans le Doubs, nous avons recensés 8 ponts nécessitant des mesures de sécurité immédiates, comme l’interdiction de l’emprunter. La principale cause reste le non-respect du tonnage des véhicules qui empruntent l’ouvrage d’art en question. », note Séverine Bourgeois, directrice du Cerema Centre-Est. De cette étude, découle surtout un travail logistique et administratif porté par le Cerema pour aider les collectivités à financer l’entretien et la rénovation de ces ouvrages d’arts. Dans le département, 154 communes ont déjà bénéficié du programme. « Plus de 235 ponts ont été visités dans le Doubs et 28 ont été jugés porteurs de risques de niveau 4 », poursuit la directrice (classement de niveau 1, jugé en bon état, au niveau 4, jugé critique, ndlr).

Vendredi 4 octobre, le sénateur Jean-François Longeot a convié une délégation de la commission sénatoriale ainsi qu’une équipe du Cerema sur ses terres, du côté de Bretonvillers. La commune de près de 300 habitants veut profiter de cet accompagnement pour rénover son pont du Get aux Cornu, traversant le Dessoubre. « Un deuxième pont à Rennes-sur-Loue est à refaire, comme du côté de Chay où la commune se penchera sur des travaux en 2026. », poursuit le sénateur. « Mais c’est un sujet sur lequel des dizaines d’élus sont penchés, avec beaucoup d’interrogations. » Plus de la moitié des ponts recensés par le Cerema ont plus de 80 ans, avec pour certains aucun ou très peu d’entretien depuis. À Rennes-sur-Loue, le pont métallique tout proche de celui de l’Ascension rénové un an plus tôt dans le cadre d’un autre programme, nécessite un important accompagnement financier : sa rénovation est estimée entre 550 000 € et 750 000 € hors taxes. Quant au pont de l’Ascension déjà rénové, le plan Ponts 2 permet désormais à la commune d’avoir l’ingénierie et l’aide du Cerema pour poursuivre sa réhabilitation et surtout surveiller l’ouvrage.

Une interrogation quant au budget alloué

Initialement pour la période 2023 – 2025, seconde phase du programme national Ponts, l’État prévoyait 55 millions d’euros pour soutenir les communes dans leurs travaux. L’incertitude du Budget 2025 porté par le gouvernement Barnier, remet néanmoins cette somme en question, qui dépend du ministère des Transports et de la Mobilité durable. « J’attends que le texte sur le Budget arrive au Sénat. Je serai vigilant, même si ça ne veut pas dire que j’obtiendrai gain de cause, sur l’importance de conserver les mêmes moyens. »

M.S