La justice pénale subit une pression forte
» Nous devons avoir une réponse adaptée et ferme quand il le faut « a souligné le Président du TJ de Besançon. Alain Troilo est revenu sur l’expérimentation du BRAJ (Bureau Régional d’Aide Juridictionnel). Il consiste à accélérer et unifier les demandes d’AJ qui ont été multipliées par deux en quelques années. Le développement de la procédure dématérialisée est actuellement expérimenté dans les TJ de Limoges, Dijon et Besançon.
» La justice civile gère la vie quotidienne des Français «
Alain Troilo est revenu sur le constat du « juge mis à toutes les sauces ». Troubles de voisinage, incivilités, divorces, successions, impayés, malfaçons…tout est prétexte à saisir le juge ! En creux, le Président Troilo pointe du doigt l’individualisme de nos concitoyens. » Nous devons modifier notre mode de travail trop artisanal « . Au-delà de l’image négative que le magistrat dresse de l’artisanat…Il demande à ce que les juges du siège deviennent » des chefs d’équipe, chargés de superviser et contrôler l’action judiciaire pour plus d’efficacité « . Il souhaite que les avocats deviennent plus des acteurs de l’apaisement, moins partisans pour une justice plus sereine.
Alain Troilo regrette le manque de moyens offerts aux décisions alternatives comme la médiation et la conciliation. En 5 ans, les conciliateurs du TJ de Besançon sont passés de 24 à 16, avec une charge de travail accrue. Il a également souligné l’importance du travail de tout le personnel de greffe.
» Les moyens doivent accompagner les ambitions « a conclu le Président Troilo, pointant du doigt des décisions politiques qui vont dans le bon sens…à condition d’avoir les moyens de leur mise en œuvre.
» La justice est une affaire de personnes. Elle doit être humaine, équitable. L’inégalité des chances doit être compensée par l’égalité des droits « .
Dernier réquisitoire de rentrée judiciaire pour Étienne Manteaux
Le Procureur de la République de Besançon, en poste depuis 2018, va quitter Besançon le 1er septembre prochain. L’émotion était palpable dans son réquisitoire « c’est avec émotion que je prends la parole devant vous aujourd’hui. C’est la septième et dernière fois que je requiers lors d’une audience solennelle à Besançon ».
Étienne Manteaux a franchi la durée normale d’exercice pour un Procureur. Si le quotidien pénal a pris l’essentiel de son temps, il quitte le Parquet après avoir eu à traiter des affaires qui ont fait la Une des médias nationaux et internationaux : le meurtre de Narumi Kurosaki et la condamnation du chilien Nicolas Zepeda, l’insupportable affaire Daval et ses rebondissements, l’enquête sur les 30 empoisonnements attribués à Frédéric Péchier qui vaudra au prévenu de comparaître aux Assises en septembre 2025…sans son accusateur dans le siège d’avocat général.
» 94% des crimes de sang élucidés en 7 ans «
C’est le fruit d’un travail entrepris collectivement par les enquêteurs et les magistrats et avec la collaboration étroite de l’État au travers de l’action des préfets successifs. Étienne Manteaux a souligné que » ce bon résultat a peu d’équivalent au plan national « .
Le narcotrafic dans la tendance nationale
Étienne Manteaux a réfuté la mexicanisation de la France mise en avant par certains médias, chiffres à l’appui. » En 2024, au plan national, on a recensé 1 100 personnes victimes d’homicides volontaires, soit 1,5 homicide pour 100 000 habitants, bien loin du chiffre de 25 homicides/100 000 habitants au Mexique ou même 6,8 aux États-Unis « . Dans le périmètre judiciaire de Besançon, deux personnes sont mortes en 2024 contre 3 en 2023 et 3 en 2022).
Insupportable de s’affranchir des règles de vie en société
Étienne Manteaux a accueilli positivement la proposition du Garde des Sceaux de placer dans des lieux de haute sécurité les plus gros narcotrafiquants. » C’est probablement une nécessité face à la situation intolérable de détenus qui continuent à gérer le trafic ou à commanditer des assassinats depuis leur cellule « .
Plus de mesures sévères concernant les violences conjugales
Le nombre de violences conjugales a augmenté de 29% en 5 ans. Ce constat est lié à deux causes principales. Le Procureur note » un meilleur accueil des victimes dans les commissariats et gendarmeries et également une intolérance à la frustration chez les auteurs de violences « . Étienne Manteaux souligne la sévérité de la justice dans les condamnations et l’augmentation des mesures d’éloignement. En 2024, 1 348 faits de violences conjugales ont été constatés justifiant 158 mesures d’éloignement.
Qu’en sera-t-il du budget 2025 de la justice ? Les magistrats du Siège et du Parquet ont été attentifs à la volonté affirmée du nouveau Garde des Sceaux de donner les moyens de ses ambitions d’action à la justice. Ce sont dans les arbitrages budgétaires que cette volonté se traduira…ou pas !