« Êtes-vous indigné ? ». Trois mots, une question. Il faut attendre cette phrase, posée par Maître Renaud Portejoie en direction de son client Nicolas Zepeda, pour déclencher sa colère. Tous attendaient cette réaction de la part d’un homme accusé d’avoir tué puis fait disparaitre le corps de Narumi Kurosaki en décembre 2016. Tous attendaient cette indignation de la part d’un suspect qui jure être innocent depuis sa mise en examen. Elle fut tardive, trop tardive, à la suite d’un amas de mensonges plus invraisemblables les uns que les autres. Cerné par une enquête minutieusement ficelée depuis sept ans, par les regards d’une cour d’assises lassée, de trois pays, Chili, Japon et France accrochés à la moindre bribe de vérité, Nicolas Zepeda explose. « Je n’ai plus peur » débute-t-il. Cette colère du mardi 19 décembre laisse transparaitre tout le contraire. Pour la première fois, l’homme tremble. « On ne pense qu’à Zepeda, sans chercher la vérité, ça me rend fou ! C’est Zepeda, c’est Zepeda, on ne veut pas savoir ce qu’il s’est passé !! JE… », puis souffle, se retient, respire. Les larmes montent, les pleurs surviennent aussitôt. « Je n’ai pas tué Narumi, je n’ai pas tué Narumi, je ne l’ai pas tuée… » répète l’accusé.
Et s’il disait vrai ? Un tel désarroi marque une cour, plus encore lorsqu’il émane d’un homme jugé manipulateur, narcissique. Perpétuité, 30 ou 28 ans, Nicolas Zepeda se rend peut-être compte que sa vie se joue à cet instant. Les faits eux, ne changent pas. Personne n’a plus jamais revu Narumi Kurosaki après lui. Le soir de sa disparition, il était bien avec elle dans sa chambre du Crous. Les hurlements glaçants entendus par ses voisins la même nuit, les faux messages écrits par ce dernier avec le téléphone de la japonaise, sa première fausse déclaration volontaire à Interpol, ces échanges très suspects avec son cousin à Barcelone, sa venue en France spécialement pour Narumi, son espionnage constant… Et si ce cri du cœur de quelques secondes n’était rien d’autre que celui d’un coupable qui soudainement, réalise le déni obsessionnel dans lequel il s’est lui-même plongé depuis maintenant sept ans ?