La France championne d’Europe des travailleurs frontaliers

On définit « travailleur frontalier » une personne travaillant dans un autre pays que son pays de résidence et rejoignant son domicile tous les jours ou au moins une fois par semaine. Leur nombre a plus que triplé en 20 ans. La Suisse en compte plus de 400 000.

478
La France championne d'Europe de travailleurs frontaliers ©René Hourdry
403 000 frontaliers travaillent en Suisse dont 231 000 habitent en France

Les données statistiques de l’Office fédéral de la Statistique datent de fin septembre 2024. Ce chiffre connaîtra probablement une baisse significative en 2025, compte tenu du recul de l’activité économique suisse, notamment dans les produits de luxe. La majorité des frontaliers (57%) résident en France, 23% sont italiens et 16% allemands.

Assurance maladie, qui choisir ?

Depuis 2014, les 231 000 frontaliers français relèvent de l’Assurance Maladie en Suisse (LAMal). Ils disposent toutefois d’un droit d’option pour l’Assurance Maladie française. Ce droit doit s’exercer dans un délai de 3 mois suivant la prise de fonction en Suisse.

En 2023, 68% des frontaliers français avaient opté pour l’assurance maladie française. Ils versent alors, au titre de l’Assurance Maladie une cotisation de 8%, calculée sur la base du Revenu fiscal de référence de l’année n-2.

Un travailleur frontalier perçoit alors les allocations familiales de la France, selon sa situation de famille. On va donc trouver plus souvent des jeunes en bonne santé, sans charges de famille, avec des revenus confortables, cotisant à l’assurance suisse (un coût forfaitaire moins élevé). Les travailleurs frontaliers ayant charges de famille et/ou ayant des problèmes de santé, vont choisir l’adhésion à la sécurité sociale française.

Portrait-type du frontalier français

Il s’agit plutôt d’un homme résidant principalement en Haute-Savoie, salarié, dont l’âge moyen est de 42 ans. Il réside à 32 km de son lieu de travail dans le canton de Genève.

¾ des travailleurs frontaliers résident dans 3 départements limitrophes. 43% sont en Haute-Savoie, 20% dans le Doubs et 14% dans le Haut-Rhin. Près de la moitié (47%) travaillent dans le canton de Genève, 20% dans le canton de Vaud et 8% à Bâle-Ville. 7% travaillent dans le canton de Neuchâtel et 6% à Bâle-Campagne.

Ils travaillent principalement dans trois secteurs d’activité : 20% dans l’industrie manufacturière, 14% dans les activités de services et 13% dans le commerce. 11% des frontaliers exercent dans les métiers de la santé et l’action sociale.

Le Doubs, le Jura et le Territoire de Belfort concentrent les frontaliers travaillant dans l’industrie alors que la répartition est plus équilibrée dans tous les secteurs dans l’Ain, la Haute-Savoie et le Haut-Rhin.

Certaines communautés de communes sont les gagnantes du travail frontalier

Dans certaines EPCI qui bordent la frontière, plus d’un salarié sur deux exerce en Suisse. C’est le cas notamment du Val de Morteau et du Genevois mais également du Pays de Maîche, de Grand Pontarlier, des Lacs et Montagnes du Haut-Doubs. La concentration de travailleurs frontaliers disposant de revenus plus élevés, créent des tensions importantes sur le prix des logements, tensions préjudiciables aux salariés français travaillant en France.

Une population plus masculine et plus âgée

59% des travailleurs frontaliers sont des hommes (contre 54% dans le régime général). Il est à noter que la part des frontaliers de plus de 65 ans réside plus loin de la frontière, un simple effet des retraités qui choisissent de quitter la région pour une retraite plus proche de la mer et du soleil.

54 599€ de revenu moyen

Les frontaliers affiliés à la Sécurité Sociale en France disposaient d’un revenu global de 8,4 milliards d’euros en 2022 (en hausse de 5% par rapport à 2021). Le revenu moyen de référence s’élève 55 472€ pour les moins de 65 ans et de 38 689€ pour les 65 ans et plus. Pour les moins de 65 ans, le revenu moyen des hommes est supérieur de 20,6% à celui des femmes.

Les plus hauts revenus des frontaliers cotisant en France sont concentrés dans le département de l’Ain (61 991€), la Haute-Savoie (60 419€) et le Rhône (60 018€). Le revenu moyen dans le département du Doubs est de 49 570€.

L’URSSAF Franche-Comté gère l’ensemble des frontaliers de tout l’est de la France

L’organisme de collecte des cotisations des frontaliers ayant opté pour l’assurance maladie française a passé des conventions avec des associations ou amicales de frontaliers, dans le but d’améliorer le service rendu à une population plus difficilement joignable. L’Urssaf met ainsi à la disposition des frontaliers une plateforme téléphonique dédiée (0 806 807 713), un accueil personnalisé sur rendez-vous par téléphone ou en visio, un compte en ligne pour les déclarations de revenus, le paiement des cotisations ou un contact avec un conseiller au travers d’une messagerie sécurisée.

 

Billet d’humeur : pourquoi un tel écart de revenus des deux côtés de la frontière ?

Travailleur en France ou frontalier en Suisse, les salariés ont souvent le même métier des deux côtés de la frontière mais des rémunérations bien différentes. Le succès de l’industrie d’exportation suisse sur les marchés mondiaux en est la principale explication. Il y a un lien direct entre la création de valeur et les salaires…n’en déplaise à Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT. Plus il y a de création de valeur et de richesse, plus la rémunération est élevée ! CQFD. 
A cela s’ajoute le différentiel entre le salaire net perçu par le salarié et le coût total du salaire. Un salarié français dont le salaire brut est de 100€, perçoit en net 78€ alors que l’entreprise débourse 144€. Il y a de quoi s’interroger sur le coût de notre modèle social !
Yves Quemeneur