Les rendez-vous chez les partenaires s’enchaînent, les rencontres avec le public aussi. Ce tour d’honneur a pris une autre dimension pour Lou Jeanmonnot-Laurent, assaillie par les demandes d’interviews. Un premier plateau TV sur la chaîne l’Équipe, une arrivée de rockstar sur le site nordique de la Seigne devant 500 personnes venues acclamer les champions de l’Olympic Mont d’Or. La biathlète savoure, y prend goût, toujours bien entourée de sa famille, sans pour autant changer. « On me reconnaît un peu plus dans la rue maintenant ! J’ai quand même eu le temps de retrouver les copains, c’est cool ! », rigole l’intéressée. Ce marathon touche à sa fin, au mois d’avril la biathlète se coupe de la compétition pour à nouveau profiter de son Haut-Doubs natal. « Si j’ai envie de faire du sport, je fais ce que je veux un peu comme pendant la saison. Il y a du travail, mais si je n’ai plus de plaisir, de passion, les performances ne suivront pas ». Écrire une page de l’histoire de son sport n’a jamais semblé aussi simple à gérer.
Début de saison 2023-2024, Lou Jeanmonnot-Laurent n’est pourtant pas encore sur le papier la locomotive de cette équipe de France féminine, où les questions fusent concernant l’affaire extra-sportive entre les deux stars Julia Simon et Justine Braisaz-Bouchet. Ses énormes progrès sur les skis enregistrés lors de la saison 2022-2023 se confirment à l’été, en ski-roues. L’arrivée du nouvel entraîneur Cyril Burdet y est pour quelque chose. Le coach voit très vite en Lou une future une grande championne. « Je suis là pour m’amuser et faire ce que j’aime. Dans le groupe, on s’inspire chacune de l’autre, avec nos qualités et défauts. Cette manière de faire permet de tirer tout le groupe vers le haut du début à la fin. Le reste, on s’en fout ! Avoir deux championnes comme ça à l’entrainement, forcément ça aide », analyse Lou Jeanmonnot-Laurent.
Une entrée fracassante
Pour sa première course en novembre à Östersund (Suède), la biathlète originaire de Fourcartier-et-Maison-Neuve réalise un passage parfait sur le relais mixte. Une première médaille d’or suivie de deux autres sur le sprint et la poursuite. Ses succès éveillent une soif de victoire. « Je visais un top 6 au classement général et ce premier voyage a un peu bousculé les choses. Je ne pensais pas faire autant de progrès cette saison après ceux réalisés l’an passé. », confie la championne.
À Östersund, Lou Jeanmonnot affole les compteurs : elle devient la 3e Franc-Comtoise à remporter une victoire individuelle sur le circuit international (derrière la pontissalienne Florence Baverel sur le sprint des JO de Turin en 2006 et Anaïs Bescond). Elle est la 4e française à réaliser le doublé sprint-poursuite et la seule femme à avoir réussi un 30/30 au tir. Un homme a réussi la même performance : Martin Fourcade. On espère la même réussite pour la carrière de Lou.
En Autriche une semaine plus tard, Lou Jeanmonnot-Laurent, leader de la poursuite, porte même le maillot jaune du classement général, le temps d’une course. Les premières difficultés arrivent. Les performances sont plus difficiles, la biathlète contracte même le Covid l’empêchant d’être alignée sur une course en Suisse. En reculant au général, la pression s’évacue. « À ce moment, je me dis que sportivement le général est terminé ou presque en loupant des courses. Je visais le top 6 et quand tu es sportivement capable de jouer ce classement, toutes les places devant sont atteignables en fonction du contexte. Ça a été plus simple par la suite. » À Oberhof et Ruhpolding (Allemagne), les Françaises confirment leur forme individuellement et deviennent imbattables ensemble. Sur la mass start italienne (Antholz) Lou Jeanmonnot-Laurent retrouve un podium, juste derrière Julia Simon, en pleine bourre. « Sportivement, c’est ma plus belle course de la saison. »
Les championnats du monde, parenthèse dorée
Les Bleues entérinent leur supériorité en février, lors des championnats du monde à Nove Mesto (République Tchèque). Sur le sprint, les quatre premières places sont tricolores dont la 3e pour la biathlète du Haut-Doubs. « C’est mon plus beau souvenir, toutes unies dans une ambiance de dingue. » Elle décroche ensuite, l’or par deux fois, d’abord avec Quentin Fillon-Maillet sur le relais simple mixte puis, inévitablement, sur le relais femmes. La moisson est belle pour Lou qui repart avec quatre médailles dont deux titres. « Je peux toujours m’améliorer sur les skis, le pas de tir, la prépa physique. Tous les paramètres doivent être affinés même si je ne vais pas pouvoir gagner 30 secondes chaque année. »
Une ambition sans limite
Ces mondiaux provoquent un déclic chez elle pour une fin de saison en apothéose : six podiums en huit courses dont deux victoires, permettent à la biathlète de remporter le classement de la mass start et décrocher le petit globe de cristal. « Très bien, magique, c’était cool. Que dire, j’ai encore du mal à réaliser », se souvient l’intéressée. « Si c’était prévu ? C’est difficile à dire, je prévois aussi d’être championne olympique ! Bon après, gagner le globe de cristal a plus de valeur à mes yeux, mais ça ne veut pas dire que je ne veux pas des Jeux au contraire ! ».
M.S