Était-ce un loup isolé ? Une autre meute ailleurs, plus près des villages ? Toujours est-il qu’un nouveau GAEC à Frasne vient de subir sa première attaque de loup. Une ferme et des parcelles situées à plus d’une vingtaine de kilomètres de Mouthe et Chaux-Neuve où la majorité d’attaques de loups a été recensée ces derniers mois.

« Il a découvert notre génisse de 6 mois éventrée au petit matin »

Les quatre agriculteurs ont appris la mauvaise nouvelle mardi 25 octobre : « L’un des éleveurs est allé donner à manger aux veaux comme tous les matins. Il s’est aperçu qu’ils n’étaient plus que 10 au lieu de 11. En cherchant il a découvert notre jeune génisse de 6 mois éventrée sur le sol. », explique l’un des éleveurs.

Pour cette entreprise familiale la nouvelle inquiète mais surtout, confirme la présence d’un loup observé sur le secteur depuis une quinzaine de jours. « Nous avons appelé l’OFB immédiatement pour qu’ils viennent constater qu’il s’agissait d’abord d’une attaque de loup et pas autre chose. Une fois que le lien a été établi, ils nous ont proposé de faire venir des louvetiers pour protéger nos troupeaux, on a accepté. », poursuit un second agriculteur.

Une nuit blanche à surveiller le troupeau

Le duo de lieutenants n’intervient pas immédiatement. « Ils n’étaient pas disponibles mardi soir, on devait attendre le lendemain. J’ai passé une nuit à tourner en voiture à travers nos parcelles pour maintenir une présence humaine et ne pas laisser le loup revenir. », confie un autre éleveur du GAEC. Une succession de va-et-vient, phares allumés pour empêcher un autre drame.

Après cette soirée sans fermer l’œil, les agriculteurs retrouvent le binôme de lieutenants vers 18h ce mercredi 26 octobre, sur la parcelle prédatée.

« Le tir de défense avait été autorisé par Jean-François Colombet, préfet du Doubs, par arrêté préfectoral pris le 25 octobre, après la prédation constatée la veille sur la parcelle en question. Le tir a été déclenché alors qu’un loup était observé en situation d’attaque sur le troupeau du GAEC concerné. Il est donc parfaitement conforme aux dispositions de l’arrêté ministériel du 23 octobre 2020. », écrit la Préfecture du Doubs. Les détails du communiqué démontrent à quel point la situation est tendue.

Un tir de défense létal à 20h30

Il est près de 20h30 quand le loup refait son apparition. Était-ce le même que deux jours auparavant, personne ne le sait. La carcasse de la génisse éventrée, elle, est encore présente, les services d’équarrissage disposant de 48h pour intervenir. « Le loup a procédé à une attaque physique du troupeau présent dans les parcelles, sans s’intéresser à la carcasse présente. Un compte-rendu précis a été transmis à l’autorité préfectorale. […] Le tir de défense létal est réalisé « dans les conditions requises par la réglementation. », précise le communiqué de la Préfecture.

Un deuxième loup tué en l’espace d’un mois après le tir réalisé sur la commune des Longevilles-Mont d’Or, le 20 septembre dernier. De son côté l’OFB recense 26 attaques depuis le 8 août, 22 vaches mortes et 25 autres blessés.

Dans la commune de près de 2000 habitants, la nouvelle a fait le tour en une soirée. « J’ai reçu pas mal de soutien de la part des jeunes agriculteurs », ajoute l’un des éleveurs. « C’est une source de stress pour nous car c’est malheureux d’en arriver là et surtout on ne sait pas si c’était un loup isolé ou un groupe. Au début du mois d’octobre il y a eu une attaque à la Chapelle d’Huin c’est encore plus bas que chez nous. »

Une météo douce pour rester dehors

Les agriculteurs profitent d’une météo douce en ce début novembre pour laisser leurs bêtes le plus longtemps possible dehors, après des sécheresses obligeant certains à taper dans les réserves de foin prévues pour l’hiver. Pour eux cette période pourrait être bien plus dangereuse. « C’est une première attaque, on ne va pas tout changer notre fonctionnement après ça, on espère que ça ne se reproduira pas. Quand il y aura 30 centimètres de neige et que le gibier se fera plus rare, que les vaches seront rentrées, on se demande comment le loup va réagir. Il y a des dizaines de chemins pédestres et de ski de fond autour de Frasne. Il ne faudrait pas que survienne un drame. »

De son côté Jean-François Colombet, préfet du Doubs, « rappelle l’importance d’aller au-delà de cette seule réponse pour protéger les troupeaux contre les attaques lupines. Un travail a été enclenché avec des expérimentations de protection dans l’objectif de proposer des mesures adaptées au territoire afin d’assurer la bonne cohabitation entre les éleveurs bovins et le loup dans le massif jurassien. »

M.S