L’invité de la rédaction. Philippe Tichit, président du comité départemental de ski du Doubs

Alors que l’enneigement des dernières semaines a permis au grand public comme aux sportifs de chausser les skis, le moral n’est pas au beau fixe au sein du comité où plusieurs dossiers ont apporté leur lot d’inquiétudes pour l’avenir.

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Philippe Tichit.

Le début d’hiver a dû vous satisfaire ?

En ce qui concerne la météo oui bien entendu. L’épisode neigeux de fin décembre a permis à toutes les stations du département d’ouvrir et de faire le plein. Une véritable aubaine en période de vacances scolaires. Tout le monde a été satisfait de pratiquer le ski alpin, le ski nordique et même le saut à ski. Une bouffée d’oxygène, alors qu’on peut regretter une période que l’on peut qualifier de « ski bashing ».

Qu’entendez-vous par « le ski bashing » ?

On a l’impression que beaucoup veulent tourner la page du ski dans le Doubs et le massif du Jura. Prenons l’exemple de la fermeture du secteur de Piquemiette du côté de Métabief. C’est une décision politique prise afin de faire des économies sachant que ce secteur représentait 40% du coût de fonctionnement de la station. Mais selon le comité départemental que je préside, c’est un mauvais calcul. Financier d’abord, car c’est la porte d’entrée de l’ensemble de la station pour la clientèle suisse notamment. Ceux-là dans leur grande majorité ne pousseront pas jusqu’à Métabief et iront skier ailleurs.

Quelles sont les conséquences sportives de la fermeture de Piquemiette ?

C’était là que se trouvait la seule et unique piste du département homologuée pour les compétitions de nos jeunes ! Nous sommes donc contraints d’organiser nos courses dans le Jura ou plus loin dans les Alpes. Avec des conséquences au niveau des frais engendrés et de la logistique. Plus généralement, Piquemiette permettait de ventiler les pratiquants sur un domaine assez vaste pour ne pas avoir un phénomène d’engorgement et de cohue comme cet hiver. Cette situation est désagréable pour ceux qui pensent trouver là du calme et un site familial. Ils risquent de se tourner du côté des Alpes.

Un autre sujet assombrit cet hiver avec la fin de l’opération moniteurs de ski dans les écoles…

La ligne budgétaire prévue, environ 110 000 €, n’apparaît plus dans ce qui a été voté par le Conseil Départemental du Doubs, à l’unanimité. C’est un dispositif qui existe depuis 40 ans avec 10 moniteurs qui interviennent dans 50 écoles du Haut-Doubs volontaires. 4500 enfants sont concernés. Cela permet d’initier les enfants aux pratiques des sports de neige. Une façon efficace d’en faire la promotion non seulement auprès des enfants mais aussi auprès des familles. Cette impulsion est poursuivie au sein des clubs où les enfants retrouvent le même moniteur qu’à l’école. Cette opération originale enviée dans bien d’autres départements va donc s’arrêter.

Vous évoquez dans un courrier aux élus des conséquences insoupçonnées. Lesquelles ?

À défaut de découvrir le ski dans le cadre scolaire, ces enfants ne le pratiqueront peut-être jamais en dehors alors que nous avions mis en place une approche populaire et non élitiste. C’est un premier regret. Par voie de conséquence, c’est aussi peut-être se priver de champions de demain qui mettent en valeur notre territoire. Lou Jeanmonnot ou Joséphine Panier pour ne citer qu’elles, des athlètes qui brillent au niveau mondial, ont bénéficié de ce dispositif avant d’aller plus loin en club. Qu’en sera-t-il demain alors qu’aujourd’hui, sur 16 jeunes skieurs qui représentent le massif du Jura, 14 viennent du Doubs et obtiennent de bons résultats ? Cette fin annoncée pourrait entrainer la disparition du comité départemental du ski puisque nous ne disposerons plus de cette originalité unique en France.

Une lueur d’espoir tout de même sur ce dossier ?

Nous avons écrit aux élus départementaux ainsi qu’aux présidents de communautés de communes des territoires concernés. Ces intercommunalités contribuaient en effet à hauteur de 18% du financement. Il est évident qu’elles ne pourront pas se substituer au Département, mais nous allons réfléchir ensemble à d’éventuelles solutions. Les dernières semaines ont prouvé que le ski n’est pas mort. Certes, la neige est moins présente qu’autrefois, nous ne le nions pas. Mais face à ce constat, il faut savoir se réinventer, s’adapter et être réactifs. Dans une station quatre saisons, l’hiver compte. La neige est un véritable produit d’appel pour notre massif. Il suffit de constater l’engouement pour les pratiques hivernales lors de ces dernières vacances, sur l’ensemble des sites de notre territoire. Nous restons mobilisés au service des jeunes et de la promotion du ski.